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SOMMAIRE
JURISPRUDENCE UE : Validant l’extension de la présomption de l’exercice effectif d’une influence déterminante au cas où une société mère exerce l’ensemble des droits de vote associés aux actions de sa filiale, même si elle ne détient pas la totalité ou la quasi-totalité du capital de cette dernière, la Cour de justice confirme l’amende infligée à Goldman Sachs solidairement avec ses filiales pour leur participation au cartel des câbles électriques
JURISPRUDENCE UE : La Cour de justice de l’Union confirme le pouvoir de la Commission d’adresser à une entreprise une nouvelle demande de renseignements après la communication des griefs, pourvu qu’elle soit motivée aux fins de l’enquête, nécessaire et proportionnée
JURISPRUDENCE UE : Le Tribunal de l’Union confirme la décision de la Commission déclarant le rapprochement des deux principaux cablo-opérateurs néerlandais compatible avec le marché intérieur
JURISPRUDENCE FOLLOW-ON : La Cour administrative d’appel de Nantes augmente la provision accordée au département de la Loire-Atlantique dans le cadre d’une action en réparation d’une pratique d’offre de couverture sanctionnée par l’Autorité de la concurrence
INFOS CONTRÔLE DES CONCENTRATIONS UE : La décision de la Commission autorisant, sous conditions, l'acquisition de Bombardier par Alstom est en ligne
INFOS AIDES D’ÉTAT : La Commission prolonge jusqu'au 31 décembre 2021 et étend l'Encadrement temporaire pour soutenir l'économie dans le contexte de l'épidémie de coronavirus
INFOS : L’Autorité de la concurrence accepte et rend obligatoires les engagements proposés par Lego de modifier sa politique de remise tarifaire concernant les ventes en ligne
INFOS : Dans la perspective — prochaine — de l’augmentation significative du plafond des sanctions pécuniaires applicables aux organismes professionnels, l’Autorité consacre une étude à l'application du droit de la concurrence à ces organismes
INFOS : Deux députés, auteurs d’un rapport sur l’Évaluation de la politique industrielle, proposent de réformer la politique de la concurrence dans le sens du pragmatisme et de la réciprocité
INFOS : Élodie Vandenhende nommée adjointe au chef du service de l’économie numérique de l’Autorité
ANNONCE WEBINAIRE : « Increasing FDI scrutiny in the EU: What does this mean in practice? » — 2 février 2021, 15:30 CET [Message d'Orion Berg]
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JURISPRUDENCE UE : Validant l’extension de la présomption de l’exercice effectif d’une influence déterminante au cas où une société mère exerce l’ensemble des droits de vote associés aux actions de sa filiale, même si elle ne détient pas la totalité ou la quasi-totalité du capital de cette dernière, la Cour de justice confirme l’amende infligée à Goldman Sachs solidairement avec ses filiales pour leur participation au cartel des câbles électriques
Le 27 janvier 2021, la Cour de justice de l’Union a rendu son arrêt dans l’affaire C-595/18 (The Goldman Sachs Group Inc. contre Commission).
Elle y rejette le pourvoi de la banque d’affaire demandant l’annulation de l’arrêt rendu le 12 juillet 2018 par le Tribunal de l’Union dans l’affaire T-419/14 (The Goldman Sachs Group, Inc/Commission) à propos du cartel des câbles électriques. Ce faisant, la Cour de justice valide l’extension de la présomption de l’exercice effectif d’une influence déterminante au cas où une société mère exerce l’ensemble des droits de vote associés aux actions de sa filiale, même si elle ne détient pas 100 % du capital de cette dernière.
On se souvient qu’à la faveur d’une décision rendue le 2 avril 2014, la Commission avait infligé des amendes d’un montant global de 302 millions d'euros à 11 producteurs de câbles électriques à haute tension souterrains et sous-marins servant à raccorder des capacités de production au réseau électrique ou pour interconnecter les réseaux électriques de différents pays pour leur participation à un cartel grâce auquel six producteurs européens, trois japonais et deux coréens À partir de 1999 et pendant près de dix ans, ces sociétés se sont partagé les marchés et réparti les clients à une échelle quasi-mondiale.
La plupart des producteurs concernés avait introduit un recours devant le Tribunal de l’Union européenne pour faire annuler la décision de la Commission et obtenir l’annulation des amendes infligées ou une réduction du montant de ces amendes. Par 15 arrêts en date du 12 juillet 2018, le Tribunal avait rejeté l’ensemble de ces recours.
Ains, certaines entreprises contestaient le paiement solidaire de l’amende infligée à leur filiale. Sur ce point, le Tribunal avait validé l’analyse de la Commission selon laquelle ces entreprises avaient bien exercé une influence déterminante sur le comportement de leurs filiales. À cet égard, le Tribunal avait conclu spécifiquement dans l’affaire T-419/14 (The Goldman Sachs Group, Inc/Commission), à l’instar de la Commission, que, lorsqu’une société mère, en l’occurrence une banque d’investissement, détient l’ensemble des droits de vote associés aux actions de sa filiale, notamment en combinaison avec une participation hautement majoritaire du capital de cette filiale, ladite société mère se trouve dans une situation analogue à celle de propriétaire exclusif de cette filiale, de sorte que la société mère est en mesure de déterminer la stratégie économique et commerciale de la filiale, quand bien même elle ne détient pas la totalité ou la quasi-totalité du capital social de cette dernière. Ce faisant, le Tribunal a validé l’extension opérée par la Commission de la présomption de l’exercice effectif d’une influence déterminante établie par l’arrêt Akzo au cas où une société mère a la possibilité d’exercer l’ensemble des droits de vote associés aux actions de sa filiale, même si elle ne détient pas 100 % du capital de cette dernière. Dès lors que la présomption de l’exercice effectif d’une influence déterminante est fondée sur la prémisse selon laquelle la détention par la société mère de 100 % ou de la quasi-totalité du capital de sa filiale permet à la Commission de conclure, sans preuve à l’appui, que ladite société mère a le pouvoir d’exercer une influence déterminante sur la filiale sans que les intérêts d’autres associés aient besoin d’être pris en compte lors de l’adoption des décisions stratégiques ou de gestion courante de cette filiale, laquelle détermine son comportement sur le marché non pas de façon autonome, mais en se conformant aux vœux de cette société mère, ces considérations sont pleinement applicables dans le cas où une société mère a la possibilité d’exercer l’ensemble des droits de vote associés aux actions de sa filiale, car ladite société mère est en mesure d’exercer un contrôle total sur le comportement de ladite filiale sans que des tiers, notamment d’autres actionnaires, puissent en principe s’y opposer
À l’appui de son pourvoi, la requérante invoquait deux moyens.
Par son premier moyen, tiré d’une violation de l’article 101 TFUE et de l’article 23, § 2, du règlement n° 1/2003, la requérante contestait le fait qu’elle ait été tenue pour responsable d’une infraction au droit de la concurrence de l’Union commise par ses filiales Prysmian et par PrysmianCS au cours de la période comprise entre le 29 juillet 2005 et le 3 mai 2007, date à laquelle une partie des parts de Prysmian a été introduite à la Bourse de Milan (Italie) par une offre publique initiale (OPI). À cet égard, elle soutenait que sa participation dans les fonds GSCP V, qui contrôlait ses filiales, était d’environ 33 % seulement, le reste du capital étant détenu par des investisseurs tiers indépendants. De plus, la participation de ces fonds au capital de Prysmian se serait élevée, pendant la période antérieure à l’OPI, et à l’exception des 41 premiers jours, tout d’abord, à environ 91 %, puis à environ 84 %. Selon la requérante, la présomption de l’exercice effectif d’une influence déterminante ne saurait s’appliquer dans de telles circonstances, conformément au principe fondamental selon lequel les présomptions doivent être appliquées de manière restrictive. À cet égard, l’approche du Tribunal ne serait pas conforme à l’arrêt du 10 septembre 2009, Akzo Nobel e.a./Commission
Rappelant que la Commission s’est appuyée sur une présomption de l’exercice effectif d’une influence déterminante de la requérante sur le comportement de Prysmian et, indirectement, de PrysmianCS, en se fondant, non pas sur le niveau de participation indirecte de la requérante dans le capital de Prysmian, mais sur le constat selon lequel la requérante contrôlait l’ensemble des droits de vote associés aux actions de Prysmian (pt. 29), le Tribunal relève qu’il est constant que la requérante ne détenait pas, pendant la période antérieure à l’OPI, la totalité du capital de Prysmian, la participation des fonds GSCP V au capital de Prysmian s’élevant pendant cette période, et à l’exception des 41 premiers jours, tout d’abord, à environ 91 %, puis à environ 84 %, et que, dans la décision litigieuse, la Commission n’a pas considéré que cette participation signifiait que la requérante avait détenu la presque totalité du capital de Prysmian (pt. 34).
En revanche, ajoute la Cour, il ressort de la jurisprudence que c’est non pas la simple détention de la totalité ou de la quasi-totalité du capital de la filiale en elle-même qui fonde la présomption de l’exercice effectif d’une influence déterminante, mais le degré de contrôle de la société mère sur sa filiale que cette détention implique. Par conséquent, le Tribunal a pu, sans commettre d’erreur de droit, considérer, en substance, qu’une société mère qui détient l’ensemble des droits de vote associés aux actions de sa filiale se trouve, à cet égard, dans une situation analogue à celle d’une société détenant la totalité ou la quasi-totalité du capital de la filiale, de sorte que la société mère est en mesure de déterminer la stratégie économique et commerciale de la filiale. En effet, une société mère détenant l’ensemble des droits de vote associés aux actions de sa filiale peut, tout comme une société mère détenant la totalité ou la quasi-totalité du capital de sa filiale, exercer une influence déterminante sur le comportement de cette dernière (pt. 35). Il s’ensuit que, contrairement à ce que la requérante fait valoir, le Tribunal n’a pas commis d’erreur de droit en considérant que, dès lors qu’une société mère détient l’ensemble des droits de vote associés aux actions de sa filiale, la Commission est en droit de se fonder sur une présomption de l’exercice effectif d’une influence déterminante de cette société mère sur le comportement de sa filiale sur le marché (pt. 36). Peu importe à cet égard que l’identification des personnes qui détiennent les votes associés aux actions d’une société puisse, le cas échéant, s’avérer plus difficile que la détermination des personnes à qui appartiennent ces actions. Pour la Cour en effet, rien n’indique que de telles difficultés puissent être susceptibles de porter atteinte à la sécurité juridique, dès lors qu’une société mère qui, sans détenir la totalité ou la quasi-totalité des actions de sa filiale, s’est réservée ou a acquis l’ensemble des droits de vote associés à ces actions, ne peut, à l’évidence, ignorer la situation dans laquelle elle se trouve (pt. 39).
Quoi que l’on pense de l’utilisation — que l’on peut estimer excessive — par les autorités de concurrence de la notion d’entreprise au sens du droit de la concurrence et, plus encore, de la présomption de l’exercice effectif d’une influence déterminante sur la filiale lorsque la société mère détient la totalité ou la quasi-totalité du capital de cette filiale, force est d’admettre que le raisonnement de la Commission, validé tour à tour par le Tribunal et par la Cour, est juridiquement imparable. Dès lors que l’on parle d’exercice effectif d’une influence déterminante sur une société contrôlée, il est clair que la détention des droits de vote constitue le critère ultime du contrôle et, par suite, s’avère à cet égard plus cruciale que la détention du capital, et ce, à chaque fois que la détention des droits de vote et la détention du capital ne coïncident pas.
Par son second moyen, la requérante soutenait que le Tribunal avait commis une erreur de droit, premièrement, en s’appuyant, pour confirmer l’appréciation de la Commission selon laquelle la responsabilité de la requérante pouvait être retenue également pour la période postérieure à l’OPI, sur des éléments applicables à la période antérieure à l’OPI, deuxièmement, en affirmant seulement que l’OPI n’avait rien changé et, troisièmement, en renversant, en pratique, la charge de la preuve au détriment de la requérante.
Sur quoi la Cour relève que le Tribunal a examiné la question de savoir si la requérante avait, d’une part, pendant la période antérieure à l’OPI et, d’autre part, pendant la période postérieure à l’OPI exercé une influence déterminante sur le comportement de Prysmian sur le marché. Pour ce faire, il a examiné, en détail, les huit éléments sur lesquels la Commission s’était fondée à cet égard. Parmi les éléments se rapportant à toute la période infractionnelle, le Tribunal a notamment examiné le pouvoir de nomination des membres des divers conseils d’administration de Prysmian ainsi que le pouvoir de convoquer les actionnaires aux assemblées et de proposer la révocation des administrateurs ou de l’ensemble des conseils d’administration. Or, estime la Cour, il ne ressort aucunement de cet examen que, pour vérifier si la requérante avait exercé une influence déterminante sur le comportement de Prysmian sur le marché pendant la période postérieure à l’OPI, le Tribunal se serait fondé sur des éléments applicables à la période antérieure à l’OPI ou qu’il aurait renversé la charge de la preuve au détriment de la requérante. En effet, il ressort de cet examen que, loin d’avoir considéré que l’OPI n’avait pas apporté de changements à cet égard, le Tribunal a soigneusement pris en compte les éléments invoqués par la Commission dans la décision litigieuse, en distinguant clairement les périodes antérieure et postérieure à l’OPI (pt. 72).
La requérante soutenait encore que c’est à tort que le Tribunal a constaté qu’elle disposait, au sein du conseil d’administration de Prysmian, du niveau de représentation nécessaire pour influencer le comportement de cette dernière sur le marché. À cet égard, la Cour estime que le Tribunal a suffisamment identifié les liens entre la requérante et les membres du conseil d’administration de Prysmian (pt. 89).
Par ailleurs, rappelant qu’il ne ressort pas de la jurisprudence de la Cour que des liens personnels entre deux sociétés ne pourraient être pertinents, à cet égard, que dans le cas d’un cumul de fonctions. En effet, la pertinence de tels liens personnels réside dans le fait qu’ils sont susceptibles de suggérer qu’une personne, bien qu’étant active pour une société donnée, poursuit effectivement, eu égard à ses liens avec une autre société, les intérêts de cette dernière. Or, tel peut également être le cas lorsqu’une personne, qui siège dans le conseil d’administration d’une société, est liée à une autre société au moyen de « services de conseil antérieurs » ou de « contrats de consultant », comme le Tribunal l’a relevé. Par suite, conclut la Cour, le Tribunal n’a pas commis d’erreur de droit en considérant que de tels liens personnels peuvent, en principe, être pertinents afin d’établir si une société mère peut exercer une influence déterminante sur le comportement de sa filiale sur le marché (pts. 94-95).
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JURISPRUDENCE UE : La Cour de justice de l’Union confirme le pouvoir de la Commission d’adresser à une entreprise une nouvelle demande de renseignements après la communication des griefs, pourvu qu’elle soit motivée aux fins de l’enquête, nécessaire et proportionnée
Le 28 janvier 2021, la Cour de justice de l’Union a rendu son arrêt dans l’affaire C-466/19 (Qualcomm et Qualcomm Europe contre Commission européenne).
La Cour y rejette le pourvoi introduit par Qualcomm et Qualcomm Europe par lequel elles demandaient l’annulation de l’arrêt rendu le 9 avril 2019 par le Tribunal de l’Union européenne dans l’affaire T-371/17 (Qualcomm et Qualcomm Europe contre Commission européenne).
À la suite d’une plainte déposée le 8 avril 2010 par Icera Inc., la Commission européenne a ouvert une enquête à l’égard de Qualcomm concernant un possible abus de position dominante sous la forme de prix prédateurs sur le marché des chipsets de bande de base UMTS (Universal Mobile Telecommunications System).
À la suite de plusieurs demandes de renseignements au titre de l’article 18 du règlement 1/2003, la Commission a ouvert une procédure formelle à l’encontre de Qualcomm et Qualcomm Europe et a adopté le 8 décembre 2015 une communication des griefs à l’encontre de celles-ci.
Après que Qualcomm et Qualcomm Europe ont présenté leurs observations sur la communication des griefs, la Commission, notamment au vu des critiques formulées dans ces observations sur la communication des griefs, leur a adressé une nouvelle demande de renseignements, à laquelle Qualcomm s’est opposée, obligeant la Commission à adopter une décision de demande de renseignements, sous astreinte de 580 000 euros par jour de retard, en vertu de l’article 18, § 3, du règlement 1/2003.
C’est précisément à l’encontre de cette décision du 31 mars 2017 que Qualcomm et Qualcomm Europe ont introduit un recours devant le Tribunal de l’Union.
Aux termes de l’arrêt attaqué, le Tribunal a rejeté ce recours, estimant que la Commission pouvait adresser à une entreprise une nouvelle demande de renseignements après la communication des griefs, pourvu qu’elle soit motivée aux fins de l’enquête, nécessaire et proportionnée.
À l’appui de leur pourvoi, les requérantes soulèvent six moyens.
Par leur premier moyen, les requérantes font valoir que le Tribunal n’a pas examiné certains arguments qu’elles ont soulevés, d’une part à propos de l’argumentation des requérantes tirée d’une violation de leurs droits de la défense en raison de la durée excessive de la procédure administrative et, d’autre part, à propos du sixième moyen, tiré d’une violation du principe de bonne administration.
Sur ce point, la Cour constate, aux points 30 à 31 du présent arrêt, que le Tribunal a effectivement statué à la fois sur le grief tiré du caractère excessif de la durée de la procédure administrative et sur le grief tiré d’une violation du principe de bonne administration, et qu’il a suffisamment motivé en quoi ces deux griefs devaient être écarté. Ce faisant, la Cour approuve le Tribunal d’avoir appliqué au cas d’espèce la jurisprudence selon laquelle la violation du principe du respect du délai raisonnable n’est susceptible de justifier l’annulation que d’une décision constatant des infractions prise à l’issue d’une procédure administrative fondée sur l’article 101 ou 102 TFUE, et dès lors qu’il a été établi que cette violation avait porté atteinte aux droits de la défense des entreprises concernées, en considérant que, en ce que le recours dont il était saisi avait pour objet non pas une décision de constatation d’une violation de l’article 102 TFUE, mais une décision de demande de renseignements adoptée dans le cadre d’une procédure administrative pouvant le cas échéant aboutir à une telle décision de constatation d’une infraction, l’argumentation tirée du caractère excessif de la durée de la procédure administrative était sans pertinence dans le cadre de l’examen de ce recours et devait dès lors être écartée comme étant inopérante.
Par leur deuxième moyen, les requérantes soutenaient que la conclusion du Tribunal selon laquelle la décision attaquée était suffisamment motivée était fondée sur des erreurs manifestes de fait et de droit et sur une motivation insuffisante.
Sur ce point, la Cour constate, aux points 46 à 48 du présent arrêt, que ce deuxième moyen de pourvoi doit être écarté comme étant manifestement irrecevable à raison d’une absence de motivation du grief et d’une contestation des constatations factuelles opérées par le Tribunal.
Par leur troisième moyen, les requérantes faisaient encore valoir que la conclusion du Tribunal selon laquelle les renseignements requis par la décision attaquée étaient nécessaires est fondée sur des erreurs manifestes de droit et de fait, une dénaturation des éléments de preuve, une motivation insuffisante et une absence de prise en compte de l’ensemble des éléments de preuve pertinents. Ainsi, le Tribunal aurait commis des erreurs de droit et de fait, ainsi qu’une dénaturation des éléments de preuve et n’aurait pas suffisamment motivé l’arrêt attaqué en concluant, premièrement, que la décision litigieuse n’avait pas modifié le cadre de l’enquête diligentée, tel que celui-ci avait été défini dans la communication des griefs, deuxièmement, que la Commission était légalement habilitée à demander des renseignements relevant de périodes situées en dehors de ce cadre et, troisièmement, que les renseignements demandés dans cette décision étaient nécessaires.
Au-delà des prétendues erreurs de fait et dénaturations des éléments de preuve que le Tribunal écarte comme étant manifestement irrecevables, la Cour s’attache à l’appréciation par le Tribunal du caractère nécessaire des renseignements demandés par la décision litigieuse. Sur ce point, la Cour rappelle que la communication des griefs étant un acte provisoire et susceptible de modification, la Commission n’est pas liée par les appréciations de fait portées dans celle-ci. Au contraire, elle est tenue de procéder à une évaluation de ces appréciations sur la base des éléments résultant de l’intégralité de son enquête et, en particulier, des observations présentées par les parties, en vue d’adapter et de compléter son argumentation à l’appui des griefs qu’elle retient. La Commission est dès lors en droit de demander des renseignements supplémentaires à cet effet, notamment afin de mieux cerner l’étendue de l’infraction, pour autant que ceux-ci sont nécessaires (pt. 73). Quant au caractère nécessaire des renseignements demandés, il découle de deux séries de constatations factuelles, effectuées par le Tribunal : d’une part, à la suite notamment des observations des requérantes sur la communication des griefs, la Commission avait estimé que les données sur lesquelles elle s’était appuyée pour établir le critère « prix-coût » dans cette communication des griefs ne reflétaient pas les prix effectivement payés par les clients des requérantes pendant la période infractionnelle, en raison des principes de comptabilisation des revenus appliqués par les requérantes et du fait que les chipsets en cause avaient été vendus sous des configurations différentes. D’autre part, le Tribunal a considéré que les renseignements demandés, y compris ceux relatifs à des périodes adjacentes à la période infractionnelle, visaient précisément à remédier à une telle divergence, en obtenant des données reflétant fidèlement la situation durant cette période afin d’établir un critère « prix-coût » adéquat, dans la mesure où ce dernier était déterminant pour vérifier les soupçons d’infraction pesant sur les requérantes (pts. 74-75). De sorte qu’il ne saurait être reproché au Tribunal d’avoir, en l’occurrence, commis une erreur de droit, ni d’avoir méconnu son obligation de motivation (pt. 76).
Par leur quatrième moyen, les requérantes soutenaient que la conclusion du Tribunal selon laquelle les renseignements requis par la décision attaquée étaient proportionnés est fondée sur des erreurs manifestes de fait, une dénaturation des éléments de preuve et une motivation insuffisante. Il est notamment reprocher au Tribunal de n’avoir pas pris en compte, dans le cadre de son appréciation du caractère proportionné des renseignements demandés par la décision litigieuse, la charge de travail requise des requérantes afin de retrouver et d’analyser les documents de nature à fournir ces renseignements.
Sur ce point, la Cour estime aux points 108 à 109 que le Tribunal a expressément reconnu l’importance de cette charge de travail, non sans avoir rappelé que le caractère proportionné d’une demande des renseignements doit être apprécié par rapport aux nécessités de l’enquête, sans que le fait qu’une telle demande impose à l’entreprise une charge de travail importante suffise en soi à démontrer qu’elle revêt un caractère disproportionné. Dès lors, le Tribunal a conclu à juste titre que la charge de travail requise pour fournir les renseignements demandés ne revêtait pas un caractère disproportionné au vu des nécessités de l’enquête liées aux présomptions d’infraction alléguées, et ce notamment compte tenu des réponses des requérantes à la communication des griefs. La Cour écarte également tour à tour aux points 111 à 123 l’argumentation des requérantes contestant le fait que la Commission ait d’imposé un format contraignant de réponse à la décision litigieuse, celle concernant la détermination de la portée du devoir des requérantes de conserver les données et documents demandés par la décision litigieuse et celle tenant à la contestation du caractère proportionné du montant de l’astreinte prévue à l’article 2 de la décision litigieuse.
Par leur cinquième moyen, les requérantes faisaient valoir que le Tribunal avait appliqué de manière erronée les règles relatives à la charge de la preuve en ce qui concerne les prétendues violations de l’article 102 TFUE. Renversant la charge de la preuve, la Commission aurait exigé d’elles d’accomplir des tâches relevant de sa compétence.
La Cour écarte le moyen aux points 129 à 132 comme étant, en partie, manifestement irrecevable et, en partie, non fondé.
Par leur sixième moyen, les requérantes soutenaient enfin que le Tribunal avait tiré des conclusions qui violaient le droit de ne pas s’auto-incriminer.
Sur ce point, la Cour relève que le Tribunal a motivé à suffisance de droit la conclusion selon laquelle, dans la mesure où les renseignements demandés par la décision litigieuse revêtaient un caractère purement factuel, consistant notamment dans la demande de production de documents internes, la fourniture de ces renseignements n’imposait pas aux requérantes de se livrer à des appréciations de nature à les amener à reconnaître avoir agi en violation de l’article 102 TFUE. La Cour rappelle à cet égard que le Tribunal a indiqué qu’il appartient au juge de l’Union de vérifier, en cas de contestation de la portée d’une question posée par une demande de renseignements, si une réponse du destinataire équivaudrait effectivement à reconnaître la commission d’une infraction et, d’autre part, que les réponses d’ordre purement factuel ne sauraient, en principe, être regardées comme étant susceptibles de contraindre le destinataire à admettre la commission de cette infraction (pt. 145).
En fin de compte, la Cour rejette le pourvoi dans son intégralité et confirme, ce faisant, le pouvoir de la Commission d’adresser à une entreprise une nouvelle demande de renseignements après la communication des griefs, pourvu qu’elle soit motivée aux fins de l’enquête, nécessaire et proportionnée.
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JURISPRUDENCE UE : Le Tribunal de l’Union confirme la décision de la Commission déclarant le rapprochement des deux principaux cablo-opérateurs néerlandais compatible avec le marché intérieur
Le 27 janvier 2021, le Tribunal de l’union a rendu un arrêt dans l’affaire T-691/18 (KPN BV contre Commission européenne).
Dans cette affaire, la requérante, KPN BV, un fournisseur de services de télévision au détail sur un réseau cablé, contestait par son recours la décision rendue le 30 mai 2018 à la faveur de laquelle la Commission a confirmé le rapprochement des deux principaux cablo-opérateurs néerlandais, Ziggo et Liberty Global.
On se souvient que le 26 octobre 2017, dans l’affaire T-394/15 (KPN BV contre Commission européenne), le Tribunal de l’Union avait annulé, en raison d’un défaut de motivation, la décision initialement adoptée le 10 octobre 2014 par la Commission déclarant ledit rapprochement compatible avec le marché intérieur.
À la faveur de la décision de 2014, la Commission avait autorisé Liberty Global à prendre le contrôle de trois des quatre chaînes de télévision premium payantes aux Pays-Bas (Film1, HBO Nederland et Sport1), parmi lesquelles figurent les deux seules chaînes de cinéma premium payantes (Film1 et HBO Nederland). Toutefois, comme Liberty Global s’était engagé à céder Film1, supprimant du même coup le chevauchement horizontal entre les activités des parties en ce qui concerne les chaînes de cinéma premium payantes aux Pays-Bas, et comme la Commission avait considéré que l’opération envisagée ne donnerait lieu à aucun chevauchement horizontal entre les deux chaînes de sport premium payantes, étant donné que Sport1 appartenait déjà à Liberty Global et que Fox Sports ne ferait pas partie de l’opération envisagée, l’opération avait pu être autorisée.
Toutefois, le Tribunal, accueillant le deuxième moyen de KPN BV, avait considéré que la décision attaquée ne contenait aucune analyse sur les effets verticaux résultant de l’opération de concentration envisagée dans l’hypothèse où le marché du produit en cause serait défini comme étant celui de la fourniture et de l’acquisition en gros de chaînes sportives premium payantes. À cet égard, il avait estimé que la Commission aurait dû expliquer, même de manière succincte, les raisons pour lesquelles l’opération envisagée ne soulevait pas de problème de concurrence.
Aux termes de décision attaquée rendue le 30 mai 2018, la Commission s’est donc efforcée de démontrer que Liberty Global n’avait pas la capacité de s’engager dans une stratégie de verrouillage en raison de l’existence de Fox Sports et ne serait pas incitée à le faire. Elle a donc examiné si l'entité fusionnée aurait la capacité et l'incitation à s'engager dans une stratégie de verrouillage des intrants, et en particulier dans le verrouillage complet des intrants en refusant de donner accès à Ziggo Sport Totaal (ZST) à ses concurrents au stade de la distribution de détail.
S’agissant en premier lieu de la capacité à s'engager dans une stratégie de verrouillage des intrants, la Commission a considéré que, même si l'entité fusionnée disposait de la capacité technique de cesser de fournir ZST en gros à des tiers dans le futur, elle n’aurait pas la capacité d’exclure ses concurrents en aval. En effet, la pénétration du marché de ZST est faible, les clients disposent d’alternatives à ZST et et les fournisseurs de télévision peuvent recourir à des stratégies permettant de contrer une telle stratégie de verrouillage. Même si des contenus sportifs importants sont diffusés sur ZST, cela ne conférerait pas un pouvoir de marché important à l’entité fusionnée, dès lors que les droits de diffusion desdits contenus sportifs sont contestables sur le marché en amont et que la popularité de certains contenus sportifs fluctue avec le temps.
En ce qui concerne les effets d’un verrouillage complet de ZST, la Commission a estimé en tout état de cause qu’il ne pourrait avoir un impact négatif sur le marché aval que dans une mesure très limitée. Du fait que ZST n’est pas un intrant suffisamment important, son verrouillage ne pourrait avoir un effet préjudiciable sur la concurrence en aval sous la forme de relèvement des prix ou en érigeant des barrières à l’entrée. Au final, la Commission a considéré que l'entité fusionnée pouvait avoir l'incitation mais n'avait pas la capacité de priver les concurrents d’une concurrence effective sur le marché en aval.
Dans son recours contre la décision attaquée, la requérante soulevait quatre moyens
Par son premier moyen, tiré d’une erreur manifeste d’appréciation concernant la définition du marché en cause, la requérante, soutenant que chacune des deux chaînes de télévision sportives premium payantes proposées au Pays-Bas, Ziggo Sport Totaal et Fox Sports, constituait un marché distinct, critiquait l’absence de segmentation additionnelle du marché de la fourniture et de l’acquisition en gros de chaînes de télévision sportives premium payantes. Selon elle, les chaînes Ziggo Sport Totaal et Fox Sports ne sont pas substituables en raison de l’absence de substituabilité du contenu sportif qu’elles diffusent mais seraient complémentaires.
Rappelant que la demande ou, en d’autres termes, la clientèle, sur le marché de la fourniture et de l’acquisition en gros de chaînes de télévision sportives premium payantes, est composée par les fournisseurs au détail de services de télévision, qui incorporent ces chaînes dans leur offre aux consommateurs finaux (pt. 71), le Tribunal estime que c’est sans commettre d’erreur manifeste d’appréciation que la Commission n’a pas segmenté davantage, dans la décision attaquée, le marché de la fourniture et de l’acquisition en gros de chaînes de télévision sportives premium payantes, compte tenu de la substituabilité des chaînes, notamment Ziggo Sport Totaal et Fox Sports, du côté de la demande, à savoir du point de vue des fournisseurs au détail de services de télévision (pt. 81). Ce qui est décisif est la substituabilité de ces chaînes du côté de la demande dans ce marché, composée par les fournisseurs au détail de services de télévision. Dès lors peu importe que, pour le consommateur final, un contenu sportif ne soit pas parfaitement interchangeable avec un autre, puisque le marché en cause en aval est celui de la fourniture au détail de services de télévision payante, et non celui de la fourniture au détail de services de télévision payante de contenus sportifs, et encore moins celui de la fourniture de services de télévision payante de contenus footballistiques (pt. 84).
Par son deuxième moyen, tiré d’une erreur manifeste d’appréciation concernant les effets verticaux de la concentration relatifs au marché de la fourniture et de l’acquisition en gros de chaînes de télévision sportives premium payantes, la requérante soutenait, en substance, que la Commission avait commis une erreur manifeste d’appréciation en considérant que la concentration envisagée ne soulevait pas de problèmes verticaux de concurrence sur le marché de la fourniture et de l’acquisition en gros de chaînes de télévision sportives premium payantes, et en particulier des effets de verrouillage des intrants concernant Ziggo Sport Totaal.
Sur quoi le Tribunal, rappelant que, lors de l’évaluation de la probabilité d’un scénario de verrouillage anticoncurrentiel du marché des intrants, la Commission est tenue d’examiner, premièrement, si l’entité issue de la concentration aurait, à l’issue de l’opération de concentration, la capacité de verrouiller l’accès aux intrants de manière significative, deuxièmement, si elle aurait l’incitation à le faire et, troisièmement, si une stratégie de verrouillage du marché aurait une incidence négative significative sur la concurrence en aval, étant précisé que ces trois conditions sont cumulatives, de sorte que l’absence de l’une d’elles est suffisante pour exclure le risque de verrouillage des intrants anticoncurrentiel (pts. 111-112), relève que la Commission a examiné ces trois conditions en l’espèce (pt. 113).
S’agissant donc de la première condition, à savoir la capacité de s’engager dans une stratégie de verrouillage des intrants, laquelle suppose que la société verticalement intégrée issue de l’opération de concentration doit avoir un pouvoir substantiel sur le marché situé en amont, à savoir le marché de la fourniture en gros de chaînes de télévision sportives premium payantes en l’espèce (pt. 116), le Tribunal observe que l’entité issue de la concentration avait une part de marché de 20 à 30 % en termes de nombre total d’abonnés à Ziggo Sport Totaal (et de 10 à 20 % lorsque seuls les abonnés à cette chaîne en gros, c’est-à-dire sur les réseaux de tiers, étaient comptabilisés), alors que Fox Sports, son seul autre concurrent, avait une part de marché de 70 à 80 % en termes de nombre total d’abonnés (et de 80 à 90 % lorsque seuls les abonnés en gros étaient comptabilisés). Dès lors, la Commission a pu observer que Fox Sports était de loin le principal opérateur sur l’éventuel marché de la fourniture de chaînes de télévision sportives premium payantes, qui était la segmentation du marché envisagée la plus étroite, avec une part de marché plus de deux fois plus élevée en termes de nombre total d’abonnés (pt. 116). c’est sans commettre d’erreur manifeste d’appréciation que la Commission a conclu, dans la décision attaquée, que l’entité issue de la concentration n’aurait pas la capacité de s’engager dans une stratégie de verrouillage des intrants concernant Ziggo Sport Totaal (pt. 121). Et puisque les trois conditions relatives à l’existence d’un risque de verrouillage des intrants sont cumulatives, le Tribunal rejette le deuxième moyen comme étant non fondé.
Par son troisième moyen, la requérante invoquait une erreur manifeste d’appréciation relative aux effets verticaux de la concentration résultant d’un verrouillage des intrants concernant la fourniture et l’acquisition en gros de chaînes de cinéma premium payantes, en particulier concernant le contenu de HBO.
Observant que l’entité issue de l’opération n’est plus active sur le marché de la fourniture et de l’acquisition en gros de chaînes de télévision sportives premium payantes, puisque HBO Nederland a été dissoute à la suite de la décision Liberty Global/Ziggo de 2014, le Tribunal constate que la concentration ne serait en principe pas susceptible de donner lieu à des effets verticaux résultant d’un verrouillage des intrants concernant la fourniture et l’acquisition en gros de chaînes de cinéma premium payantes, puisque l’entité issue de l’opération n’est plus active sur ce marché (pt. 149). À la suite de la dissolution de HBO Nederland, VodafoneZiggo a conclu un accord avec HBO pour la distribution exclusive du contenu de HBO. Dans ces conditions, la Commission a examiné les effets résultant du refus de fournir le service de vidéo à la demande « Movies & Series », qui proposait le contenu de HBO en exclusivité, sur la concurrence en aval sur le marché de la fourniture au détail de services de télévision payante et de services « multiple play ». Après avoir examiné en particulier si l’entité issue de l’opération avait un pouvoir de marché en amont grâce à son service de vidéo à la demande « Movies & Series », la Commission a conclu que tel n’était pas le cas. Elle a observé que le marché des services de vidéo à la demande aux Pays-Bas n’était pas concentré et que le service « Movies & Series » avait une part de marché inférieure à 30 % en termes de revenus et d’abonnés, en concurrence avec plusieurs fournisseurs de services de vidéo à la demande non intégrés verticalement, tels que Netflix, Videoland, Film1, Pathé Thuis et Amazon Prime (pt. 150). Dès lors, pour le Tribunal, c’est sans commettre d’erreur manifeste d’appréciation que la Commission a conclu dans la décision attaquée qu’une éventuelle stratégie de verrouillage n’aurait pas d’effets négatifs significatifs sur la concurrence en aval (pt. 151).
Par son quatrième moyen, tiré d’une violation de l’obligation de motivation, la requérante soutenait que, dans la décision attaquée, la Commission avait violé l’obligation de motivation en ce qui concerne la définition du marché en cause et l’absence de risque de verrouillage des intrants concernant Ziggo Sport Totaal et le contenu de HBO à l’égard de ses concurrents sur le marché en aval.
Sur ce point, le Tribunal estime que la Commission a motivé à suffisance sa décision en ce qui concerne la définition du marché en cause et en ce qu’elle explique l’inexistence d’effets verticaux.
Par suite, le recours est rejeté dans son intégralité.
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JURISPRUDENCE FOLLOW-ON : La Cour administrative d’appel de Nantes augmente la provision accordée au département de la Loire-Atlantique dans le cadre d’une action en réparation d’une pratique d’offre de couverture sanctionnée par l’Autorité de la concurrence
On se souvient qu’à la faveur d’une décision n° 11-D-07 du 24 février 2011, l’Autorité de la concurrence, saisie par le ministre de l’économie, avait sanctionné quatre sociétés à hauteur de 1 160 100 euros pour s’être concertées sur les prix lors de marchés de travaux de peinture portuaire et d’ouvrages d’art entre 2005 et 2006.
Dix ans après la décision devenue définitive de l’Autorité et quinze ans après les faits, le département de la Loire-Atlantique, qui a engagé une action en réparation du préjudice qu’il estime avoir subi du fait du surcoût supporté dans le cadre de la passation en 2006 du marché public de travaux concernant la réparation et la remise en peinture du pont de Varades en raison de pratiques anticoncurrentielles organisées dans le cadre d’une entente de couverture entre deux sociétés, n’a toujours pas obtenu réparation définitive de son préjudice.
Pour l’heure, on en est encore à discuter de l’évaluation du préjudice, des résultats de l’expertise prescrite à la demande du département de la Loire Atlantique par le juge des référés du Tribunal administratif de Nantes à la faveur d’une ordonnance du 25 mars 2016 et du montant de la provision — 200 000 euros — allouée par ledit juge des référés au département de la Loire-Atlantique par ordonnance du 19 décembre 2019, provision que les deux entreprises sanctionnées par l’Autorité contestent dans son principe, dans la mesure où elles soutiennent qu’aucun agissement dolosif ne peut leur être reproché et qu’il n’existe pas de lien de causalité entre leur faute supposée et le préjudice allégué par le département, tandis que ce dernier conteste, quant à lui, le montant de la provision, qu’il juge insuffisant.
Par arrêt en date du 22 janvier 2021 (merci à Jamal Henni pour l’info), la Cour administrative d’appel de Nantes vient confirmer, s’appuyant largement sur les constatations opérées par l’Autorité de la concurrence, l’existence d’une faute du chef des deux entreprises qui se sont entendues sur la présentation d’une offre de couverture, comme l’existence d’un préjudice économique subi par le département de la Loire-Atlantique, au regard notamment de la différence, établie par le rapport d’expertise, entre le prix négocié du marché, s’élevant à 2 384 464,50 euros, et l’estimation préalable pertinente, s’élevant à 2 097 494 euros, qui en avait été faite par le maître d’oeuvre de l’opération dans le cadre de sa mission d’assistance à la passation du marché. La Cour de Nantes confirme également l’existence d’un lien de causalité entre la faute commise et le préjudice économique subi par le département.
Par ailleurs, l’entreprise qui s’était contentée de déposer une offre de couverture tandis que l’autre entreprise emportait le marché contestait le fait qu’elle doivent verser solidairement la provision de 200 000 € fixée par le juge des référés au département de la Loire-Atlantique. Sur quoi, la Cour répond qu’en présence d’une entente généralisée entre ces deux sociétés pour fausser les règles de la concurrence, dont le marché conclu avec le département de la Loire-Atlantique n’était qu’un volet, les deux sociétés doivent se garantir mutuellement à hauteur de la moitié de la somme.
Quant aux conclusions d’appel incident présentées par le département de la Loire-Atlantique contestant le montant de la provision, qu’il jugeait insuffisant, la Cour administrative d’appel de Nantes y fait partiellement droit en fixant la provision mise à la charge des deux sociétés au montant non sérieusement contestable de 280 000 euros tous intérêts compris, au lieu de 200 000 euros. La Cour tient là visiblement compte de la différence, établie par le rapport d’expertise, entre le prix négocié du marché, s’élevant à 2 384 464,50 euros, et l’estimation préalable pertinente, s’élevant à 2 097 494 euros, soit près de 287 000 euros
Pour Jean-François Laborde, expert inscrit au tableau des cours administratives d'appel de Paris et de Versailles, que j’ai sollicité, l'évaluation de l'indemnité provisionnelle obtenue par le département de la Loire-Atlantique amène deux observations principales.
Première observation : cette évaluation se fonde sur les résultats d'une expertise judiciaire (ordonnée en l'espèce dans le cadre d'un référé-expertise). Ce point ne surprend pas : les juridictions administratives ont nommé des experts judiciaires dans près des deux-tiers des actions follow-on qu'elles ont eu à juger.
Deuxième observation : l'expert a employé ici non pas une seule méthode d'évaluation du préjudice, mais deux méthodes distinctes. L'idée de déployer en parallèle plusieurs méthodes, de manière à pouvoir comparer leurs résultats, peut sembler assez naturelle. En pratique, cette manière de procéder n'est pourtant que peu fréquemment relevée (dans environ 10 % à 20 % des affaires seulement).
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INFOS CONTRÔLE DES CONCENTRATIONS UE : La décision de la Commission autorisant, sous conditions, l'acquisition de Bombardier par Alstom est en ligne
Le 25 janvier 2021, la Commission a publié la décision du 31 juillet 2020 à la faveur de laquelle elle a autorisé, sous conditions mais au terme de la phase I, l’acquisition de Bombardier Transportation, la division mondiale « solutions ferroviaires » de Bombardier, par Alstom, tous deux leaders mondiaux du secteur du transport ferroviaire, qu’il s’agisse du matériel roulant, TGV, trains de grande ligne (trains intercity et régionaux) et matériel roulant urbain (trams et métros), ou qu’il s’agisse des solutions de signalisation urbaine et grandes lignes.
Pour faire vite, la Commission a identifié de sérieux problèmes de concurrence sur trois marchés, celui de la production et la fourniture de TGV, sur lequel l'entité issue de la concentration serait devenue le leader incontesté du marché, jouissant d'une position importante (au regard des prises de commandes 2010-2019, la nouvelle entité occuperait [50-60 %] de parts de marché à l’échelle mondiale et [60-70 %] au niveau de l’EEE) (pt. 294) et plus encore si l’on considère les 5 dernières années (pt. 309) ; celui des trains de grande ligne sur lequel elle serait devenue le leader incontesté du marché, jouissant d'une position importante, spécialement en France (avec une part de marché combiné de [90-100 %]) (pt. 433) et en Allemagne ou en Suède ; et enfin celui des solutions de signalisation grandes lignes sur lequel elle aurait eu la capacité et la motivation de faire en sorte qu'il soit plus difficile pour les autres fournisseurs de dispositifs embarqués de type ETCS — le système européen de contrôle des trains actuellement déployés dans tout l'EEE pour faciliter le respect des normes adoptées à l'échelle européenne et favoriser l'interopérabilité et la sécurité des voyages transfrontières — d'assurer la compatibilité avec ses nombreux systèmes de signalisation déjà installés (pts. 1014-1016), et ce, spécialement aux Pays-Bas.
S’agissant de la délimitation des marchés pertinents, la Commission confirme ici l’appréciation qu’elle avait faite à propos du projet de rapprochement Alstom /Siemens selon laquelle le matériel roulant à très grande vitesse semble constituer un marché pertinent distinct de celui des trains à grande vitesse (pt. 39) et selon laquelle le marché géographique pourrait être mondial, à l'exclusion de la Chine, de la Corée du Sud et du Japon, en raison d'obstacles insurmontables pour pénétrer ces marchés nationaux (pt. 188). Tandis qu’elle considère que le marché du matériel roulant de grandes lignes est très probablement de dimension nationale (pt. 223), alors que le marché des métros comme celui des tramways couvrent l’ensemble de l’EEE (pts. 235 et 248).
Pour la Commission, l'impact structurel de l'opération sera très important. Elle supprimera le plus grand concurrent d'Alstom du marché du matériel roulant à très grande vitesse, à la fois au niveau de l'EEE et au niveau mondial, renforçant la position d’Alstom de manière significative (pt. 325). Alors même qu’Alstom et Bombardier sont des concurrents très proches (pt. 349) et que le marché du matériel roulant à très grande vitesse est caractérisé par des barrières à l’entrée élevées dans l'EEE et au niveau mondial (pt. 380) et que le pouvoir compensateur des clients est limitée (pt. 397).
De même, s’agissant des trains de grande ligne, la Commission estime que l’opération aura un impact négatif sur la capacité des concurrents à remporter des contrats ou affectera leur incitation à participer aux appels d'offres contre les parties, réduisant ainsi le résultat concurrentiel des appels d'offres dans les pays où les parties ont une forte position concurrentielle comme la France et l'Allemagne (pt. 517). Alors même qu’Alstom et Bombardier sont les concurrents les plus proches (pt. 529), qu’il existe des barrières à l’entrée élevées spécialement en France et en Allemagne (pt. 557), que les fournisseurs asiatiques tels que CRRC et Hyundai Rotem ne devrait pas devenir des acteurs crédibles dans l'EEE dans les 2 à 5 prochaines années (pt. 559) et dans la mesure où le pouvoir compensateur de négociation des opérateurs ferroviaires nationaux est limitée, particulièrement en France et en Allemagne, où le marché est caractérisées par une forte concentration et des barrières à l'entrée importantes (pt. 579).
Afin de répondre aux préoccupations de la Commission, Alstom a proposé une série d’engagements, principalement de nature structurelle pour ce qui concerne le matériel roulant, et essentiellement de nature comportementale pour ce qui concerne les solutions de signalisation.
Ainsi, Alstom s’est engagé à céder des actifs de Bombardier actuellement affectés au « Zefiro V300 », la plateforme de TGV développée conjointement avec Hitachi. Il s'est aussi engagée à prendre une série de mesures destinées à préserver l'offre conjointe présentée en consortium par Bombardier et Hitachi à HS2, projet qui constitue aujourd'hui la meilleure occasion de produire en Europe un matériel roulant à très grande vitesse. En effet, il est apparu que Hitachi dépendait de Bombardier pour le développement du Zefiro V300 et pour l'itération de la plate-forme Zefiro offerte à HS2 et qu’il ne serait pas capable, sans la contribution de Bombardier, de continuer à fabriquer et à fournir la plate-forme sur une base autonome (pt. 316).
S’agissant des trains de grande ligne, Alstom a consenti à diverses cessions d’actifs : la plateforme de trains grandes lignes Coradia Polyvalent d'Alstom, l'usine d'Alstom à Reichshoffen, en France, la plateforme de trains grandes lignes Talent 3 de Bombardier, et une partie de l'usine de Bombardier à Hennigsdorf, en Allemagne.
Quant aux solutions de signalisation grandes lignes, Alstom s’est engagé à fournir à ses concurrents des dispositifs embarqués hérités ainsi que des informations et du soutien nécessaires pour garantir la compatibilité. Il a pris un engagements similaire à l’égard du gestionnaire néerlandais de l'infrastructure, ProRail, et ce, au profit de tous les opérateurs intéressés.
Pour le surplus, je vous renvoie à la lecture du communiqué de presse de la Commission.
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INFOS AIDES D’ÉTAT : La Commission prolonge jusqu'au 31 décembre 2021 et étend l'Encadrement temporaire pour soutenir l'économie dans le contexte de l'épidémie de coronavirus
Compte tenu de la persistance et de l'évolution de l'épidémie de coronavirus, la Commission européenne a adopté, le 28 janvier 2021, après consultation des États membres, un 5ème amendement à l'encadrement temporaire des aides d’État du 19 mars 2020, lequel avait déjà été modifié à quatre reprises, les 3 avril, 8 mai, 29 juin et 13 octobre 2020.
Le présent amendement entraîne :
— La prolongation de l'encadrement temporaire dans les limites actuelles les dispositions en vigueur de l'encadrement temporaire pour six mois supplémentaires, jusqu'au 31 décembre 2021, en ce compris les mesures de recapitalisation.
— l’augmentation les plafonds d’aides fixés dans le cadre temporaire pour certaines mesures de soutien, ainsi, s’agissant des montants limités des aides accordées au titre du cadre temporaire, les plafonds par entreprise sont plus que doublés. Les nouveaux plafonds sont de 225 000 € par entreprise active dans la production primaire de produits agricoles (auparavant 100 000 €), 270 000 € par entreprise active dans le secteur de la pêche et de l'aquaculture (auparavant 120 000 €) et 1,8 million d'euros par entreprise active dans tous les autres secteurs (auparavant 800 000 €). Comme précédemment, ceux-ci peuvent être combinés avec des aides de minimis pouvant aller jusqu'à 200 000 € par entreprise (jusqu'à 30 000 € par entreprise opérant dans le secteur de la pêche et de l'aquaculture et jusqu'à 25 000 € par entreprise opérant dans le secteur agricole) sur une période de trois exercices financiers, sous réserve de se conformer aux exigences de minimis pertinents. Pour les entreprises particulièrement touchées par la crise du coronavirus, avec des pertes de chiffre d'affaires d'au moins 30 % pendant la période éligible par rapport à la même période de 2019, l'État peut contribuer à la part des coûts fixes des entreprises qui ne sont pas couvertes par leurs revenus, à hauteur de 10 millions d'euros par entreprise (auparavant 3 millions d’euros).
— la conversion d'instruments remboursables en subventions directes. La Commission autorise également les États membres à convertir jusqu'au 31 décembre 2022 les instruments remboursables (garanties, prêts, avances remboursables) octroyés au titre du cadre temporaire en d'autres formes d'aide, telles que des subventions directes, à condition que les conditions du cadre temporaire soient remplies. En principe, cette conversion ne peut dépasser les nouveaux plafonds pour des montants d'aide limités (225000 € par entreprise active dans la production primaire de produits agricoles, 270000 € par entreprise active dans le secteur de la pêche et de l'aquaculture et 1,8 million € par entreprise active dans tous les autres secteurs). Cela vise à inciter les États membres à choisir, en premier lieu, des instruments remboursables comme forme d’aide.
— La prolongation jusqu'au 31 décembre 2021 du retrait temporaire de tous les pays de la liste des pays « à risques cessibles » figurant dans la communication sur l'assurance-crédit à l'exportation à court terme, afin de tenir compte de la persistance du déficit global de capacités privées pour couvrir tous les risques économiquement justifiables pour les exportations vers les pays de la liste des pays à risques cessibles.
Pour le surplus, je vous renvoie à la lecture du communiqué de presse de la Commission.
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INFOS : L’Autorité de la concurrence accepte et rend obligatoires les engagements proposés par Lego de modifier sa politique de remise tarifaire concernant les ventes en ligne
Le 29 janvier 2021, l’Autorité de la concurrence a rendu publique la décision n° 21-D-02 qu’elle a adoptée le 27 janvier 2021 et à la faveur de laquelle elle a accepté et rendu obligatoires les engagements de la société Lego France, filiale du groupe Lego, et clôt la procédure au fond engagée à la suite des saisines formées par les sociétés Cdiscount et EMC Distribution, et ce, à la suite du test de marché lancé le 30 juillet 2020.
On se souvient que, dans leur évaluation préliminaire, les services d’instruction avaient identifié des préoccupations de concurrence relatives à la politique tarifaire du fournisseur à l’égard de ses distributeurs en ligne, en introduisant une « remise fonctionnelle » dont les modalités excluraient, selon les saisissantes, les pure players. Plus précisément, il existait entre les opérateurs revendant exclusivement sur internet et les autres types de distributeurs un écart de remise significatif (correspondant à un différentiel de points de pourcentage de remise variant entre 7 et 9 selon les périodes), essentiellement lié au fait que certains critères d’attribution de la remise excluaient de facto les pure players.
Fidèle à elle-même, l’Autorité a été prompte à déceler là une différenciation entre distributeurs selon qu’il s’agit de revendeurs actifs uniquement dans la vente en points de vente physique (« brick & mortar »), de revendeurs actifs à la fois dans la vente en points de vente physique et en ligne (« click & mortar »), ou de revendeurs actifs exclusivement dans la vente en ligne (« pure players »), de nature à générer des effets anticoncurrentiels, en limitant la pression concurrentielle que ces pure players peuvent exercer sur le commerce traditionnel.
On avait regretté en son temps que la société Lego France n’ait pas souhaité contester la position de l’Autorité, ce qui aurait permis d’avoir un débat sur le fond…
Toujours est-il que Lego a jugé préférable de répondre aux préoccupations de concurrence de l’Autorité en proposant des engagements d’une durée de 5 ans — et non plus de 3 ans — à partir du 2 mars 2021, consistant notamment à :
— redéfinir les critères d’attribution de cette remise fonctionnelle d’une façon qui traite équitablement les différentes catégories de vendeurs, en magasins physiques ou en ligne.
Toutefois, sur le premier critère et quoique l’ensemble des contributeurs au test de marché ont mis en cause la proportionnalité de l’exigence de mise en place d’un site non-commercial, lequel a pour objet, selon ses promoteurs, de « familiariser » les enfants avec sa marque plutôt que de générer des ventes immédiates, Lego France a maintenu l’exigence de mise en place d’un site non-commercial, mais a proposé d’en aménager les modalités (pt. 101), et ce, avec l’aval de l’Autorité (pt. 102), qui a pris en compte le contexte de crise sanitaire (pt. 103).
S’agissant du critère n° 2 relatif à l’évaluation de la capacité du distributeur à permettre aux consommateurs de disposer des produits contractuels immédiatement ou, à tout le moins, dans les meilleurs délais, la société Lego France s’engage principalement à introduire l’option de la livraison en point relais en complément de la livraison au domicile et de modifier la grille d’attribution des points incitant à la livraison la plus rapide. Pour le reste, elle a maintenu l’exigence, pour l’obtention de 5 points au titre du deuxième critère, de livraison au domicile le jour de l’achat, et ce, quels que soient le mode de livraison et la zone géographique concernée (pts. 106-108).
— rendre plus transparent pour ses clients son dispositif de remise ainsi que son calendrier (périodes de communication des critères d’attribution de la remise, d’évaluation puis communication des notations et taux de remise).
Enfin, Lego France s’est engagée à fournir, chaque année pendant la durée des engagements et au plus tard un mois après la date d’anniversaire de la décision, un rapport destiné aux services d’instruction de l’Autorité relatif à l’exécution de ces engagements.
Pour le surplus, je vous renvoie à la lecture du communiqué de l'Autorité de la concurrence.
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INFOS : Dans la perspective — prochaine — de l’augmentation significative du plafond des sanctions pécuniaires applicables aux organismes professionnels, l’Autorité consacre une étude à l'application du droit de la concurrence à ces organismes
Le 27 janvier 2021, l’Autorité de la concurrence a rendu publique l’étude thématique qu’elle consacre à l'application du droit de la concurrence aux organismes professionnels. Cette publication n’est pas due au hasard. Elle anticipe la prochaine augmentation significative du plafond des sanctions pécuniaires applicables à ces organismes, qui sera effective dès que l’ordonnance portant transposition de la directive ECN+ aura été publiée et que le projet de loi de ratification aura été voté par le Parlement. Alors que jusque-là le plafond de l'amende infligé à une association d'entreprises ne pouvait excéder 3 millions d’euros, il devrait être porté à 10 % de la somme des chiffres d'affaires des entreprises membres de l’organisme professionnel…
Selon les mots de la présidente de l’Autorité, celle-ci a décidé d’aider les acteurs économiques à anticiper cette évolution, en dédiant une étude spécifique aux organismes professionnels. Son but est d’analyser, au vu de la pratique décisionnelle et de la jurisprudence, tous les comportements qui risquent d’être contraires au droit de la concurrence, en rappelant aussi toutes les actions pro-concurrentielles que peuvent mener les organismes professionnels. L’étude se veut ainsi un outil « clefs en main » pour favoriser les démarches de conformité de la part des organismes professionnels des entreprises qui en sont membres.
En plus de l’étude très complète d’une centaine de pages, l’Autorité met en ligne un outil très utile : un vade-mecum à l’intention des organismes professionnels qui comporte 6 fiches thématiques — conditions d’activité professionnelle, prix, échanges d’informations, conditions d’adhésion, normalisation/certification et conseils juridiques/rapport avec les pouvoirs publics — pour éviter le risque concurrence, avec pour chaque fiche thématique, ce que l’on peut faire et ce que l’on ne doit pas faire (DOs&DON’Ts).
Pour le surplus, je vous renvoie à la lecture du communiqué de l'Autorité de la concurrence.
Sur le même sujet, on notera la parution dans le numéro de décembre 2020 de la Revue Lamy du droit de la concurrence d’une étude de Romain Maulin sur l’ « Application du droit de la concurrence aux associations professionnelles : état des lieux et perspectives à l’heure de la transposition de la directive ECN+ » (pp. 34-47), qui s’inspire et reflète les travaux menés à ce sujet dans le cadre de l’AFEC.
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INFOS : Deux députés, auteurs d’un rapport sur l’Évaluation de la politique industrielle, proposent de réformer la politique de la concurrence dans le sens du pragmatisme et de la réciprocité
Le 22 janvier 2021, l’Assemblée nationale a rendu public le rapport d’information intitulé « Évaluation de la politique industrielle », rédigé par deux députés, Olivier Marleix (LR) et Thierry Michels (LRM), au nom du Comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques.
Forcément, dès qu’on aborde la question de la politique industrielle, l’évocation de la politique européenne de concurrence, que les auteurs de ce rapport qualifie de « toute puissante », s’impose. Le présent rapport ne déroge pas à la règle. Dans la seconde partie du rapport, consacrée à la refondation d’une politique industrielle, les auteurs du rapport proposent d’accompagner le rétablissement de notre souveraineté industrielle en réformant la politique de la concurrence dans le sens du pragmatisme et de la réciprocité. Vaste programme ! Reste que toute velléité de réformes au niveau national semble pour l’heure gélée dans l’attente des résultats de la procédure législative du digital Market act (DMA) au niveau européen.
Autant le dire d’emblée, rien de bien révolutionnaire dans la proposition n° 19 du rapport, tout entière imprégnée de traumatisme consécutif chez certains à l’interdiction du rapprochement entre Alstom et Siemens, laquelle envisage quatre pistes de réforme :
— lors du contrôle des opérations capitalistiques (concentrations), tenir systématiquement compte des aides publiques (facteur potentiel de concurrence déloyale) dont bénéficient éventuellement les entreprises extracommunautaires qui sont, soit parties à l’opération, soit concurrentes des entreprises concernées par celle‑ci. En pratique, il conviendrait d’autoriser un État membre à aider une entreprise s’il apparaît que l’un de ses principaux concurrents est par exemple une entreprise publique chinoise qui est massivement subventionnée via divers dispositifs plus ou moins connus. Dans la même veine, il faudrait autoriser la fusion de deux entreprises européennes quand elles sont confrontées à un concurrent chinois qui est certes peut-être encore relativement « petit », mais réalise à l’export une croissance à deux chiffres grâce à des soutiens publics massifs.
— adopter une conception moins dogmatique et plus corrélée aux réalités économiques du « marché pertinent » sur lequel on évalue les conditions de concurrence (par exemple en s’efforçant d’analyser sur le moyen terme, à dix ans, et pas seulement sur le court terme, les perspectives d’évolution du marché) ;
— en contrepartie de règles plus souples pour le contrôle européen ex ante des concentrations, réfléchir à la mise en place de contrôles ex post. Cette proposition vise essentiellement les « killer acquisitions ». Mais pourquoi se contenter d’un contrôle ex post de ces opérations et ne pas contrôler ces opérations, si elles sont dangereuses, ex ante, fussent-elles pour l’heure en deçà des seuils de notification ?
— définir un régime dérogatoire assoupli pour les aides publiques aux ETI, comme il en existe déjà un pour les PME.
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INFOS : Élodie Vandenhende nommée adjointe au chef du service de l’économie numérique de l’Autorité
Élodie Vandenhende a été nommée, par décision du rapporteur général Stanislas Martin, au poste nouvellement créé d’adjoint au chef du service de l’économie numérique, Yann Guthmann.
Pour mémoire, le service de l’économie numérique, rattaché au rapporteur général, a pour mission de développer une expertise poussée sur l’ensemble des sujets numériques, de collaborer aux investigations sur les pratiques anticoncurrentielles dans l’économie numérique et de contribuer aux études lancées sur les nouvelles problématiques liées au développement du numérique, telle que celle en cours sur les « fintech » et le développement des grandes plateformes dans les services de paiement.
Pour le surplus, je vous renvoie à la lecture du communiqué de l'Autorité de la concurrence.
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Bonjour,
Le cabinet White & Case, en partenariat avec la Revue Concurrences, a le plaisir de vous inviter au prochain webinaire dédié au contrôle des investissements étrangers qui aura lieu le mardi 2 février 2021 à 15h30 CET :
« Increasing FDI scrutiny in the EU: What does this mean in practice? »
Stefan Amarasinha (Policy Officer, DG TRADE), Marie-Anne Lavergne (Cheffe du bureau du contrôle des investissements étrangers, Direction générale du Trésor) et Angelika Milger (Division VB1, Ministère fédéral de l'Économie et de l'Énergie de l'Allemagne) interviendront à nos côtés à cette occasion.
Inscription libre sur le site dédié.
Nous espérons vous accueillir — virtuellement — nombreux le mardi 2 février pour ce webinaire.
Meilleures salutations,
Orion Berg | Counsel, White & Case, Paris
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