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Hebdo n° 47/2022
10 janvier 2023
Actualités de la semaine du 19 au 23 décembre 2022
SOMMAIRE
 
JURISPRUDENCE AIDES D’ÉTAT : Estimant que la décision de la commission autorisant les aides de l’Allemagne aux entreprises ayant subi, dans le contexte de la pandémie de Covid-19, une perte de leur chiffre d’affaires d’au moins 30 % ne méconnaissait ni le principe de proportionnalité ni celui d’égalité de traitement, le Tribunal rejette les recours de deux distributeurs « click & mortar » qui avaient pu compenser en partie les pertes de leurs points de vente physiques par des ventes en ligne

JURISPRUDENCE AIDES D’ÉTAT : Relevant d’office que la requérante aurait finalement été éligible à une aide au titre du régime d’aides mis en oeuvre par  l’Allemagne pour compenser des pertes subies du fait du confinement pendant la crise de Covid-19, le Tribunal de l’Union rejette comme irrecevable le recours d’un distributeur « click & mortar » contre la décision de la Commission approuvant ledit régime d’aides

JURISPRUDENCE AIDES D’ÉTAT : Estimant qu’au regard des difficultés sérieuses que suscitait l’appréciation de la compatibilité des mesures notifiées avec le marché intérieur, la Commission aurait dû ouvrir la procédure formelle d’examen, le Tribunal de l’Union annule la décision par laquelle celle-ci a déclaré compatibles avec le marché intérieur la modification et la prorogation de deux régimes consistant à exonérer l’achat de biogaz du paiement de certaines accises

JURISPRUDENCE : La Cour d’appel de Paris sollicite l'avis de l’Autorité de la concurrence sur la délimitation des marchés pertinents et sur l’éventuelle position dominante de L’Équipe à propos des conditions de la résiliation du contrat de distribution des titres du groupe L’Équipe sur la plateforme de distribution de titres de presse en mode numérique Cafeyn

INFOS UE : La Commission rend obligatoires les engagements souscrits par Amazon mettant fin à deux pratiques d’auto-préférence — l’utilisation à son profit des données des vendeurs actifs sur sa place de marché et l’accès discriminatoire des vendeurs à la Buy Box et au programme Prime


INFOS : Constatant l’absence de disparition de ses préoccupations de concurrence, l’Autorité de la concurrence refuse de lever, avant 2026, les engagements souscrits par TDF en faveur de l’ouverture du marché de l’hébergement sur sites pylônes, rendus obligatoires par la décision n° 15-D-09

INFOS : L’Autorité sanctionne une pratique de prix excessifs et une pratique de discrimination dans le secteur du contrôle technique des poids lourds en Guadeloupe


INFOS : L’Autorité émet des réserves sur le mécanisme d’équilibrage prévu dans le projet d’arrêté modificatif relatif à la procédure d’agrément et portant cahier des charges des éco-organismes de la filière des emballages ménagers

INFOS : L’Autorité rejette pour absence d’éléments suffisamment probants la saisine de quatre radiothérapeutes qui se plaignaient d’avoir été évincés de l’accès au plateau technique d’un centre de radiothérapie de l’Essonne


INFOS CONTRÔLE DES CONCENTRATIONS : La décision autorisant la Caisse de dépôt et placement du Québec, active dans le secteur ferroviaire, à prendre le contrôle d’Akiem, société française active dans la location de locomotives, est en ligne (+ 7 décisions simplifiées)

EN BREF : Virginie Beaumeunier quitte la tête de la DGCCRF

 

JURISPRUDENCE AIDES D’ÉTAT : Estimant que la décision de la commission autorisant les aides de l’Allemagne aux entreprises ayant subi, dans le contexte de la pandémie de Covid-19, une perte de leur chiffre d’affaires d’au moins 30 % ne méconnaissait ni le principe de proportionnalité ni celui d’égalité de traitement, le Tribunal rejette les recours de deux distributeurs « click & mortar » qui avaient pu compenser en partie les pertes de leurs points de vente physiques par des ventes en ligne

 

Le 21 décembre 2022, le Tribunal de l’Union a rendu deux arrêts en termes identiques dans les affaires T-260/21 (E. Breuninger GmbH & Co. contre Commission européenne) et T-306/21 (Falke KGaA contre Commission européenne).

Dans les deux affaires, des distributeurs actifs à la fois dans la vente en points de vente physique et en ligne (« click & mortar ») demandaient l’annulation de la décision de la Commission du 20 novembre 2020, telle que modifiée par la décision du 12 février 2021 aux termes desquelles la Commission avait autorisé un régime d’aides, sur le fondement de l’« Encadrement temporaire des mesures d’aide d’État visant à soutenir l’économie dans le contexte actuel de la flambée de COVID-19 », visant à accorder un soutien aux coûts fixes non couverts dans le contexte de la pandémie de COVID-19 sur le territoire de la République fédérale d’Allemagne, dont le plafond du montant des aides par entreprise était dans un premier temps limité à 3 millions d’euros, puis dans un second temps relevé à 10 millions d’euros, et ce, jusqu’au 31 décembre 2021.

Plus précisément, les requérantes dénonçaient le critère d’éligibilité retenue par le paragraphe 87 de l’encadrement temporaire, en vertu duquel les aides sont octroyées sur la base d’un régime soutenant les entreprises qui ont subi une baisse de leur chiffre d’affaires d’au moins 30 % au cours de la période éligible par rapport à la même période en 2019. Selon elles, cette exigence d’une baisse du chiffre d’affaires d’au moins 30 % par rapport à 2019 revêt un caractère disproportionné, à l’origine d’une inégalité de traitement au détriment des entreprises disposant de plusieurs activités dont seules certaines ont été affectées par la pandémie de COVID-19. Ainsi, en ce que ce critère aboutirait à les exclure ou à réduire le bénéfice du régime d’aides litigieux, il les obligerait à recourir au financement croisé de leurs activités affectées, contrairement à leurs concurrentes exclusivement actives dans le commerce physique de détail, lesquelles auraient pu pleinement bénéficier dudit régime (aff. T‑260/21, pt. 26). Bref, elles contestaient le fait que la perte du chiffre d’affaires soit appréciée au niveau de l’entreprise, plutôt qu’au niveau des seules activités affectées par la pandémie de COVID-19 (aff. T‑260/21, pt. 40).

Sur quoi le Tribunal commence par rappeler que le respect du principe de proportionnalité par une mesure inclut trois composantes. La première composante porte sur son caractère approprié, à savoir son aptitude à réaliser l’objectif légitime poursuivi. La deuxième composante concerne sa nécessité et implique que ledit objectif légitime ne puisse être atteint par des moyens moins contraignants, mais tout aussi appropriés. Enfin, la troisième composante, parfois qualifiée de « proportionnalité au sens strict », porte sur son caractère proportionné, à savoir l’absence d’inconvénients démesurés par rapport aux buts visés.

Passant en revue ces trois composantes, le Tribunal appréciant d’abord le caractère approprié du critère d’éligibilité en cause, relève que la pandémie de COVID-19 a entraîné une perturbation grave de l’économie allemande, de sorte qu’elle relève du champ d’application de l’article 107, paragraphe 3, sous b), TFUE (aff. T‑260/21, pt. 52) et que le régime en cause vise à remédier au manque de liquidité auquel sont confrontées les entreprises en raison de la pandémie de COVID-19, et de faire en sorte que les perturbations causées par celles-ci ne compromettent pas leur viabilité (aff. T‑260/21, pt. 53), en leur permettant de maintenir leur activité commerciale en leur offrant un tremplin solide pour se relancer (aff. T‑260/21, pt. 54), ce qui est conforme à l’objectif de l’article 107, § 3, sous b), TFUE et s’inscrit dans la mise en œuvre du large pouvoir d’appréciation que la Commission tire de cette disposition (aff. T‑260/21, pt. 55). Pour le Tribunal, un critère aboutissant à permettre aux entreprises dont le chiffre d’affaires a été réduit au-delà d’un pourcentage de 30 % en raison de la pandémie de COVID-19 d’obtenir une assistance financière s’inscrit pleinement dans la mise en œuvre de la finalité, rappelée aux points 53 et 54 ci-dessus, d’assurer la viabilité et la continuité des entreprises au cours de ladite pandémie (aff. T‑260/21, pt. 56).

Dès lors, la Commission pouvait estimer qu’il y avait lieu d’assurer la viabilité des entreprises dont une partie substantielle de l’activité avait été affectée par la pandémie de COVID-19, plutôt que de toute activité impactée par ladite pandémie, indépendamment de la situation globale de l’entreprise (aff. T‑260/21, pt. 59).

Passant au caractère nécessaire du critère d’éligibilité en cause, le Tribunal rappelant que ce n’est que dans l’éventualité où le critère alternatif mis en exergue par la requérante — celui consistant à retenir les pertes réalisées dans les domaines d’activités touchés par la pandémie de COVID-19, sans prise en compte de la situation de l’entreprise dans sa globalité — démontrerait de manière manifeste l’absence de nécessité du critère d’éligibilité retenu par la Commission qu’il pourrait être fait droit au grief de la requérante (aff. T‑260/21, pt. 66). À cet égard, le Tribunal relève que le critère alternatif mis en exergue par la requérante diffère du critère d’éligibilité en cause au regard de l’ampleur de son incidence budgétaire pour l’État membre concerné. En effet, il aurait pour conséquence l’octroi de ressources publiques à toute entreprise ayant subi des pertes en raison de la pandémie, indépendamment de sa situation financière globale. Au contraire, le critère d’éligibilité en cause limite les incidences budgétaires de telles aides en excluant ou en limitant le bénéfice du régime d’aides litigieux à l’égard d’entreprises qui, en raison d’autres sources de revenus, ont vu leur situation financière globale être affectée dans une moindre mesure par la pandémie de COVID-19 (aff. T‑260/21, pt. 67). Dès lors, c’est à tort que la requérante soutient que le critère alternatif qu’elle avance constitue une mesure « tout aussi appropriée », de nature à démontrer que le critère d’éligibilité en cause ne revêtait pas un caractère nécessaire (aff. T‑260/21, pt. 68).

Quant au caractère proportionné du critère d’éligibilité en cause, les requérantes soutenaient que le critère d’éligibilité en cause était disproportionné au regard des effets restrictifs de concurrence qu’il a occasionnés pour les entreprises dont seules certaines activités ont été affectées par la pandémie de COVID-19. Sur quoi, le Tribunal répond qu’il ne peut être retenu que la circonstance que la requérante ait été amenée à consacrer certaines de ses ressources provenant d’activités non affectées par la pandémie de COVID-19 au financement des activités affectées par cette dernière, plutôt que de procéder à de nouveaux investissements, affecte sa position concurrentielle de manière telle que la dérogation envisagée à l’article 107, § 3, sous b), TFUE ne pourrait trouver à s’appliquer. À cet égard, il relève que les concurrents de la requérante bénéficiant pleinement du régime d’aides litigieux sont également amenés à supporter une partie des pertes occasionnées en raison de ladite pandémie, la décision attaquée prévoyant, en application du paragraphe 87, sous c), de l’encadrement temporaire, que l’intensité de l’aide ne peut excéder 70 % des coûts fixes non couverts, sauf pour les micro- et petites entreprises pour lesquelles ce seuil est de 90 % desdits coûts (aff. T‑260/21, pt. 73). Le Tribunal ajoute que, contrairement aux allégations des requérantes, ledit régime ne permettra pas aux entreprises éligibles de développer leurs activités au détriment de celles de leurs concurrents. Il permet seulement à des entreprises qui, contrairement aux entreprises dont une partie substantielle de leurs activités n’a pas été affectée par la pandémie de COVID-19, ont été fortement fragilisées par ladite pandémie d’assurer leur survie (aff. T‑260/21, pt. 74).

Pour le reste, le Tribunal retient, à propos de l’absence d’examen individuel du régime d’aides litigieux et d’un défaut de motivation allégués, que, si l’adoption de l’encadrement temporaire par la Commission ne la dispensait pas de procéder à un examen individuel du régime d’aides en cause, il ne saurait être retenu, en l’espèce, que la Commission a méconnu son obligation d’examen individuel du régime d’aides litigieux (aff. T‑260/21, pt. 79), non plus qu’elle n’aurait méconnu son obligation de motivation (aff. T‑260/21, pt. 84).

D’où le rejet du recours dans son intégralité.

Pour le surplus, je vous renvoie à la lecture du communiqué de presse du Tribunal.

JURISPRUDENCE AIDES D’ÉTAT : Relevant d’office que la requérante aurait finalement été éligible à une aide au titre du régime d’aides mis en oeuvre par  l’Allemagne pour compenser des pertes subies du fait du confinement pendant la crise de Covid-19, le Tribunal de l’Union rejette comme irrecevable le recours d’un distributeur « click & mortar » contre la décision de la Commission approuvant ledit régime d’aides

 

Le 21 décembre 2022, le Tribunal de l’Union a également rendu un arrêt dans une affaire T-525/21 (E. Breuninger GmbH & Co. contre Commission européenne) sur un autre recours de la société E. Breuninger GmbH & Co. distributeurs actifs à la fois dans la vente en points de vente physique et en ligne (« click & mortar »), mais cette fois dirigé contre une autre décision de la Commission, datée du 28 mai 2021 qui, celle-ci, a autorisé l’Allemagne à mettre en œuvre un régime d’aide sous forme d’un soutien économique temporaire en faveur des entreprises dont les activités avaient été fermées en raison des mesures prises par l’État fédéral et les Länder pour faire face à la pandémie de Covid-19.

Aux termes du présent arrêt, le Tribunal rejette le recours de la société E. Breuninger GmbH & Co comme irrecevable, en relevant d’office que cette société n’avait pas justifié de l’intérêt à agir requis pour saisir le Tribunal.

Rappelant qu’un recours en annulation intenté par une personne physique ou morale n’est recevable que dans la mesure où cette dernière a un intérêt à voir annuler l’acte attaqué, lequel suppose que l’annulation de cet acte soit susceptible, par elle‑même, d’avoir des conséquences juridiques et que le recours puisse ainsi, par son résultat, procurer un bénéfice à la partie qui l’a intenté (pt. 20), le Tribunal relève que le recours de la requérante repose sur le postulat erroné qu’elle n’aurait pas été éligible au régime fédéral d’indemnisation en raison de la condition, énoncée à l’article 2, § 2, dudit régime (pt. 21), selon laquelle les entreprises poursuivant des activités mixtes, dont certaines ne sont pas du tout concernées par le confinement, ne peuvent bénéficier du régime fédéral d’indemnisation que si les activités interdites représentent au moins 80 % de leur chiffre d’affaires (pt. 23). En effet, comme les activités de commerce en ligne poursuivies par la requérante étaient considérées comme connexes à ses activités de commerce de détail (pt. 26), l’intégralité des activités était censée être affectée, au sens de cette disposition, par les décisions de confinement ordonnées lors de la pandémie de Covid-19 (pt. 27).

En revanche, il est ressorti des débats que l’impossibilité pour la requérante d’obtenir une assistance financière au titre du programme fédéral d’aides tenait à l’ajout, par les autorités allemandes, de manière unilatérale et autonome par rapport au régime fédéral d’indemnisation qui avait été notifié à la Commission, d’une condition d’éligibilité impliquant qu’au moins 30 % du chiffre d’affaires global du demandeur ait été affecté par les décisions de confinement (pt. 28).

Dès lors, relevant que l’ajout par la République fédérale d’Allemagne d’une condition d’éligibilité supplémentaire, à savoir une affectation d’au moins 30 % du chiffre d’affaires pour pouvoir bénéficier de son programme fédéral d’aides, est dénué de pertinence pour l’examen du présent recours, lequel concerne exclusivement la légalité de la décision attaquée, par laquelle la Commission a déclaré le régime fédéral d’indemnisation compatible avec l’article 107, § 2, sous b), TFUE, le Tribunal parvient à la conclusion que, au regard de l’article 2, § 2, du régime fédéral d’indemnisation, tel qu’il a été déclaré compatible avec l’article 107, § 2, sous b), TFUE dans la décision attaquée, la requérante aurait été éligible à une aide au titre dudit régime. Il en résulte, ajoute le Tribunal, que l’annulation de la décision attaquée ne procurerait aucun bénéfice à la requérante, de sorte que son recours doit être rejeté comme étant irrecevable pour défaut d’intérêt à agir (pt. 33).

Enfin, rappelant que la mise en œuvre du système de contrôle des aides étatiques, tel qu’il résulte des articles 107 et 108 TFUE, incombe, d’une part, à la Commission et, d’autre part, aux juridictions nationales, leurs rôles respectifs étant complémentaires, mais distincts (pt. 31), le Tribunal précise qu’il est loisible à la requérante de saisir les juridictions allemandes, lesquelles seront amenées à examiner si l’ajout d’une condition d’éligibilité supplémentaire par le droit national s’apparente à la modification d’une aide existante et, partant, à une aide nouvelle (pt. 32).

Pour le surplus, je vous renvoie à la lecture du communiqué de presse du Tribunal.

JURISPRUDENCE AIDES D’ÉTAT : Estimant qu’au regard des difficultés sérieuses que suscitait l’appréciation de la compatibilité des mesures notifiées avec le marché intérieur, la Commission aurait dû ouvrir la procédure formelle d’examen, le Tribunal de l’Union annule la décision par laquelle celle-ci a déclaré compatibles avec le marché intérieur la modification et la prorogation de deux régimes consistant à exonérer l’achat de biogaz du paiement de certaines accises

 

Le 21 décembre 2022, le Tribunal de l’Union a rendu un arrêt dans l’affaire T‑626/20 (Landwärme GmbH contre Commission européenne).

Le 1er avril 2020, le Royaume de Suède a notifié à la Commission européenne son intention de modifier et de proroger jusqu’au 31 décembre 2030 deux régimes d’aides qui avaient déjà été autorisés par la Commission jusqu’au 31 décembre 2020. En vertu de ces régimes, l’achat de certains gaz combustibles renouvelables (le « biogaz ») est exonéré du paiement de certains droits d’accises grevant les gaz fossiles destinés aux mêmes usages.

Sans ouvrir la procédure formelle d’examen prévue à l’article 108, § 2, TFUE, la Commission a considéré, par deux décisions rendues le 29 juin 2020, disponibles ICI et , que les mesures notifiées portaient sur des aides d’État compatibles avec le marché intérieur au titre de l’article 107, § 3, sous c), TFUE. Selon cette disposition, les aides destinées à faciliter le développement de certaines activités ou de certaines régions économiques peuvent être considérées comme compatibles avec le marché intérieur, quand elles n’altèrent pas les conditions des échanges dans une mesure contraire à l’intérêt commun. En particulier, la Commission a relevé, d’une part, que les régimes litigieux étaient nécessaires, au motif que, sans les exonérations fiscales totales prévues par ceux-ci, le biogaz coûterait plus cher que les gaz fossiles et, d’autre part, qu’il pouvait être exclu que les aides accordées en vertu de ces régimes dépassent le montant requis pour compenser les coûts plus élevés qu’entraîne la production de biogaz par rapport à la production de gaz fossiles et donnent ainsi lieu à une surcompensation desdits coûts plus élevés.

La requérante, Landwärme GmbH, productrice de biométhane en Allemagne, a introduit un recours en annulation des décisions attaquées.

Aux termes du présent arrêt, le Tribunal accueille le recours, estimant qu’au regard des difficultés sérieuses que suscitait l’appréciation de la compatibilité des mesures notifiées avec le marché intérieur, la Commission aurait dû ouvrir la procédure formelle d’examen.

S’agissant de la recevabilité du recours, d’abord, le Tribunal constate que la requérante fait notamment grief à la Commission de ne pas avoir engagé la procédure formelle d’examen en dépit du fait que cette institution ne pouvait pas ignorer l’existence de difficultés sérieuses quant au possible cumul des aides octroyées en Suède en application des régimes litigieux et d’autres aides, accordées par d’autres États membres aux producteurs de biogaz, ce cumul étant susceptible de donner lieu à une surcompensation au profit de ces producteurs lorsque ceux-ci vendent du biogaz en Suède (pt. 31). Ensuite, le Tribunal relève que la requérante, en tant que bénéficiaire indirecte potentielle des aides prévues par ces régimes et concurrente des bénéficiaires actuels desdites aides, a la qualité de partie intéressée au sens de l’article 108, § 2, TFUE et de l’article 1er, sous h), du règlement portant modalités d’application de l’article 108 TFUE (pt. 26). Par ailleurs, le Tribunal considère que la requérante a intérêt à agir, dès lors que, en cas d’annulation des décisions attaquées, elle pourrait exercer les droits procéduraux garantis aux parties intéressées dans le cadre de la procédure formelle d’examen, en présentant à la Commission des observations sur les changements à apporter aux régimes litigieux pour que ceux-ci deviennent compatibles avec le marché intérieur. Ainsi, le recours est recevable, à tout le moins en ce que, par celui-ci, la requérante fait valoir le grief relatif au cumul litigieux (pt. 41).

Avant d’examiner ce grief, le Tribunal écarte l’argument de la Commission selon lequel les lignes directrices concernant les aides d’État à la protection de l’environnement et à l’énergie pour la période 2014-2020, dont l’illégalité n’avait pas été invoquée par la requérante, ne permettent d’attribuer aucun rôle au cumul litigieux aux fins de l’évaluation de la compatibilité des régimes litigieux avec le marché intérieur. En effet, le point 116 des lignes directrices PEE ne dispense pas la Commission de l’obligation de rechercher si la surcompensation susceptible de découler du cumul litigieux, invoquée par la requérante, soulevait des difficultés sérieuses, afin de s’assurer de la proportionnalité des régimes litigieux (pt. 61).

S’agissant du bien-fondé de ce grief, le Tribunal relève que, dans les décisions attaquées, la Commission, qui disposait d’informations sur le cumul litigieux (pt. 85), n’a examiné que la surcompensation susceptible de découler du cumul de plusieurs aides accordées par le Royaume de Suède et que, ce faisant, elle a exclu que le cumul litigieux puisse susciter des difficultés sérieuses dans la détermination de la compatibilité des régimes litigieux avec le marché intérieur (pt. 91). Le Tribunal rappelle que, lorsque la Commission adopte une décision fondée sur l’article 107, § 3, sous c), TFUE à l’issue de la procédure d’examen préliminaire, elle doit être en mesure de conclure, sans que cette question soulève de difficultés sérieuses, que les aides concernées n’altéreront pas les échanges entre les États membres (pt. 94).

Après avoir rappelé que, conformément à la jurisprudence, le caractère insuffisant ou incomplet de l’examen mené par la Commission lors de la procédure d’examen préliminaire constitue un indice de l’existence de difficultés sérieuses dans l’appréciation de la mesure d’aide notifiée, le Tribunal relève que la question de l’absence de surcompensation est étroitement liée à celle de la proportionnalité des régimes litigieux. Ainsi, le fait que la Commission, en dépit des informations dont elle disposait quant aux possibles effets du cumul litigieux, a analysé l’absence de surcompensation de manière insuffisante et incomplète peut suffire, en l’espèce, pour constater l’existence de difficultés sérieuses (pt. 99).

Avant de constater que la compatibilité des régimes litigieux avec le marché intérieur soulevait des difficultés sérieuses en raison de la surcompensation susceptible de découler du cumul litigieux, le Tribunal examine les arguments de la Commission et du Royaume de Suède selon lesquels, en substance, le respect du principe de non-discrimination ou de l’article 110 TFUE impose que les exonérations fiscales prévues par les régimes litigieux s’appliquent indépendamment de l’origine du biogaz vendu en Suède, et cela sans opérer de distinction selon que l’État membre dans lequel le biogaz a été produit a accordé ou non des aides à la production d’énergie à partir du biogaz.

S’agissant du respect du principe de non-discrimination, le Tribunal souligne que l’objectif des régimes litigieux est de rendre le biogaz compétitif par rapport aux gaz fossiles, en compensant les coûts de production plus élevés du premier. Au vu de cet objectif, la vente de biogaz dont les surcoûts de production ont été compensés ne constitue pas une situation comparable à celle de la vente de biogaz dont les surcoûts de production n’ont pas encore été compensés (pt. 105). Le Tribunal précise que la différence entre ces deux situations existe même lorsque la compensation de ces surcoûts résulte d’aides accordées par d’autres États membres que le Royaume de Suède (pt. 108). En conséquence, sauf justification objective, ces deux ventes ne sauraient bénéficier de la même exonération fiscale, et ce indépendamment de la question de savoir si le biogaz vendu en Suède a été produit sur le territoire national ou a été importé (pt. 109).

Quant à l’article 110 TFUE, qui interdit aux États membres de frapper les produits importés d’impositions supérieures à celles qui frappent les produits nationaux similaires, le Tribunal relève que l’existence d’une surcompensation peut être considérée comme un critère objectif permettant d’appliquer l’exonération fiscale prévue par les régimes litigieux au seul biogaz, domestique ou importé, dont les surcoûts de production par rapport aux gaz fossiles n’ont pas déjà été compensés par d’autres aides. Cette différenciation, fondée sur un critère objectif, est de nature à éviter la discrimination qui résulterait des compensations déjà accordées au biogaz importé de certains États membres (pt. 122). Le Tribunal précise également que les régimes litigieux créent une discrimination à rebours du biogaz produit en Suède au profit du biogaz produit dans d’autres États membres qui accordent des aides à la production d’énergie à partir du biogaz. Ce résultat ne saurait être considéré comme étant imposé par l’obligation de respecter l’article 110 TFUE, dont la raison d’être consiste à empêcher qu’un État membre favorise sa propre production au détriment de celle des autres États membres (pt. 124).

Au terme de ce raisonnement, le Tribunal conclut que le nécessaire respect de l’article 110 TFUE ne permettait pas non plus d’écarter l’existence de difficultés sérieuses quant à l’incidence du cumul litigieux sur la compatibilité des régimes litigieux avec le marché intérieur (pt. 126).

Au final, le Tribunal conclut que la Commission aurait dû éprouver des difficultés sérieuses lors de l’examen de la compatibilité des régimes litigieux avec le marché intérieur, liées à la surcompensation susceptible de découler du cumul litigieux, qui nécessitent l’ouverture de la procédure formelle d’examen. Ainsi, il accueille le recours et annule les décisions attaquées.

JURISPRUDENCE : La Cour d’appel de Paris sollicite l'avis de l’Autorité de la concurrence sur la délimitation des marchés pertinents et sur l’éventuelle position dominante de L’Équipe à propos des conditions de la résiliation du contrat de distribution des titres du groupe L’Équipe sur la plateforme de distribution de titres de presse en mode numérique Cafeyn

 

À la faveur d'un arrêt rendu le 14 décembre 2022 (Merci à Jamaj Henni pour l’info) dans un litige opposant au quotidien L’Équipe la SAS lekiosque.fr, qui exerce une activité de distribution de titres de presse en mode numérique sous le nom commercial Cafeyn, à propos des conditions dans lesquelles s’est produite la résiliation du contrat de distribution des titres du groupe L'Equipe, la Chambre 5-4 de la Cour d’appel de Paris, a décidé, avant dire-droit sur l'existence d'un abus de position dominante de la société L'Équipe dans l'exécution du contrat de distribution conclu avec Lekiosque.fr, de consulter l'Autorité de la concurrence sur le fondement de l'article L. 462-3 du code de commerce, pour avis sur deux points :

— la définition du marché amont pertinent sur lequel la société l'Équipe est prétendument en position dominante et le marché aval pertinent sur lequel les pratiques alléguées par Lekiosque.fr auraient été commises ;

— la détermination d'une position dominante de L'Équipe sur le marché aval défini,

Dans cette affaire, la SAS lekiosque.fr reproche en substance à L'Équipe d'avoir imposé des conditions de transaction non équitables pendant la période de renégociation de la relation commerciale qu’elles entretenaient et de lui avoir opposé un refus de vente abusif, d'avoir confié la distribution exclusive de ses titres à un tiers, et enfin d'avoir pratiqué des prix prédateurs. Elle a fait assigner L'Equipe devant le Tribunal de commerce de Paris à l'effet notamment de voir reprendre les négociations, de voir retenir que L'Equipe a commis un abus de position dominante sur le fondement des articles L. 420-2 du code de commerce et 102 TFUE ainsi que des pratiques restrictives de concurrence.

Par jugement du 30 juin 2022, le Tribunal de commerce de Paris a débouté la SAS lekiosque.fr de l’essentiel de ses demandes, laquelle a alors interjeté appel de ce jugement.

Sur la position dominante, le Kiosque sollicite la confirmation du jugement en ce qu'il a reconnu la position dominante de L'Équipe sur le marché amont pertinent de la presse quotidienne nationale d'information sportive, évoquant une décision de l'autorité de la concurrence qui a retenu que ce quotidien sportif n'était pas substituable avec un titre économique et financier ou un journal d'information générale et politique compte tenu de la différence de contenus et qu'il bénéficiait d'une position dominante sur ce marché. Il ajoute que les versions papier et pdf des titres de presse doivent être considérées comme substituables de sorte que, selon lui, le marché pertinent sur lequel L'Équipe est présente est la presse quotidienne nationale d'information sportive, dans ses deux versions papier ou pdf et que ce journal demeure le seul titre de presse écrite, national et quotidien d'information sportive. Il sollicite de même la confirmation du jugement en ce que le tribunal a reconnu la situation de concurrence entre L'Equipe et les kiosques numériques sur le marché aval pertinent de la distribution de presse numérique.

L'Équipe rétorque que le marché pertinent sur lequel se positionne l'Équipe n'a pas été adéquatement défini par le Tribunal. Elle fait valoir à cet égard que la décision de l’Autorité a été rendue en 2014 à propos de la presse papier alors que ce secteur n'est pas concerné par l'analyse de pratiques reprochées à un éditeur de presse en ligne par une plateforme numérique pure player de diffusion de titres de presse uniquement en ligne sur des stores applicatifs, des mobiles et des sites internet en 2021. Elle estime que ne sont en cause ici que les marchés de l'exploitation de sites éditoriaux de contenus d'information générale sportive (IGS) en ligne et la distribution de ces contenus d'information IGS directement ou indirectement par les kiosques numériques et que l'édition et la diffusion de contenus d'informations sportives présentent des caractéristiques distinctes, et que plusieurs autres opérateurs sont présents sur le marché. Elle soutient encore que cette plateforme de diffusion de contenus de presse en ligne n'est pas un client de l'équipe mais un fournisseur de services d'intermédiation en ligne conformément au règlement relatif aux restrictions verticales n°2022/720. Elle ajoute que la substituabilité de l'offre d'un éditeur de contenus d'information qui diffuse directement son contenu sur son application et site avec celle d'une plateforme comme Le Kiosque est imparfaite, dans la mesure où aucun consommateur ne peut penser qu'une offre à 9,99 € pour la lecture de 1.600 titres est substituable à une offre à 9,99 € à l'Équipe en ligne, qui ne donne qu'une information sportive. Enfin, elle dénie toute position dominante de L'Équipe, la situation de monopole alléguée n'étant pas établie alors qu'en l'état actuel du marché de l'édition et de la diffusion de contenus de presse en ligne, et même sur un hypothétique marché de contenus de presse d'information générale et sportive (IGS) en ligne, la position dominante de l'Équipe ne saurait être caractérisée en égard à la multitude d'opérateurs présents éditant des contenus d'actualité sportive en ligne tels qu'Eurosport, RMC et Sports24, Bein, qui traitent les mêmes informations en temps réel sous les mêmes formats consultables en ligne.

À suivre...

INFOS UE : La Commission rend obligatoires les engagements souscrits par Amazon mettant fin à deux pratiques d’auto-préférence — l’utilisation à son profit des données des vendeurs actifs sur sa place de marché et l’accès discriminatoire des vendeurs à la Buy Box et au programme Prime

 

Le 20 septembre 2022, la Commission a, sur le fondement de l'article 9, § 1, du règlement 1/2003 mis fin à deux procédures ouvertes à l’encontre de deux  pratiques d’auto-préférence mises en œuvre par Amazon en rendant juridiquement contraignants les deux séries d’engagements souscrits par la plateforme, d’une part, à propos de l’utilisation des données des vendeurs actifs sur sa place de marché et d’autre part à propos de l’égal accès de tous les vendeurs à la Buy Box et au programme Prime.

La Commission a constaté à titre préliminaire qu'Amazon occupait une position dominante sur les marchés allemand, français et espagnol de la fourniture de services de places de marché en ligne à des vendeurs tiers. Elle a également conclu à titre préliminaire, en premier lieu, que le fait qu'Amazon s'appuie sur les données commerciales non publiques des vendeurs actifs sur sa place de marché pour ajuster ses propres offres de vente au détail faussait la concurrence sur sa plateforme et, en second lieu, que les règles et les critères d'Amazon applicables à la Buy Box et au programme Prime favorisaient indûment ses propres activités de vente au détail, ainsi que les vendeurs actifs sur sa place de marché qui utilisent les services logistiques et de livraison d’Amazon.

Les engagements :

— Sur l'utilisation des données des vendeurs actifs sur sa place de marché, Amazon s’abstiendra pendant 5 ans d’utiliser des données non publiques relatives aux activités des vendeurs indépendants sur sa place de marché, ou tirées de celles-ci, pour ses propres activités de vente au détail qui sont en concurrence avec ces vendeurs. Cela vaut aussi bien pour les systèmes automatisés d'Amazon que pour les employés qui pourraient utiliser de manière croisée les données de la place de marché d'Amazon pour prendre des décisions sur le commerce au détail.

Sur la Buy Box, Amazon appliquera l'égalité de traitement à tous les vendeurs lors du classement de leurs offres aux fins de la sélection du gagnant de la Buy Box et affichera pendant 7 ans une deuxième offre concurrente à celle du gagnant de la Buy Box s'il existe une deuxième offre d'un autre vendeur suffisamment différenciée de la première sur les plans du prix et/ou de la livraison.

- En ce qui concerne Prime, pendant 7 ans, Amazon i) fixera des conditions et des critères non discriminatoires pour l'éligibilité à Prime des vendeurs actifs sur la place de marché et des offres,  ii) permettra aux vendeurs bénéficiant des conditions Prime de choisir librement les transporteurs pour leurs services logistiques et de livraison et de négocier les conditions directement avec le transporteur de leur choix et n’utilisera pas, pour ses propres services logistiques, d'informations obtenues grâce à Prime sur les conditions et les performances des transporteurs tiers.

Les engagements rendus obligatoires couvrent toutes les places de marché actuelles et futures d'Amazon dans l'Espace économique européen, à l’exception de l’Italie, qui a déjà pris des mesures contre Amazon. Un mandataire indépendant sera chargé de contrôler la mise en œuvre et le respect des engagements.

Pour le surplus, je vous renvoie à la lecture du communiqué de presse de la Commission.

INFOS : Constatant l’absence de disparition de ses préoccupations de concurrence, l’Autorité de la concurrence refuse de lever, avant 2026, les engagements souscrits par TDF en faveur de l’ouverture du marché de l’hébergement sur sites pylônes, rendus obligatoires par la décision n° 15-D-09

 

On se souvient qu’à la faveur de la décision n° 15-D-09 du 4 juin 2015, TDF avait pris une série d’engagements pour permettre aux autres TowerCo de proposer plus facilement aux opérateurs de téléphonie mobile des offres d’hébergement alternatives pour leurs équipements de téléphonie mobile. Pour les risques de verrouillage du marché, TDF s’était engagée : i) à limiter la durée de ses futurs contrats-cadres d’hébergement à une durée de dix ans ; ii) à accroître la faculté de résiliation anticipée de sites au bénéfice des clients MNO (opérateurs de réseaux mobiles) à 4 % du nombre total de sites-pylônes visés par les contrats et permettre le report des possibilités de résiliation non utilisées d’année en année dans la limite de 10 % et iii) à limiter le montant de l’indemnité forfaitaire et libératoire pour les contrats en cours et futurs à trois mois de loyer.

Depuis 2015, le nombre de TowerCo actives sur le marché a sensiblement augmenté, passant de deux TowerCo en 2015 à cinq au moment de la demande de révision de TDF en 2021, puis à six aujourd’hui avec la création de Totem. Cette évolution dans le sens d’une ouverture du marché de l’hébergement d’antennes sur sites pylônes n’étaient pas le signe que les engagements avaient pleinement joué leur rôle et qu’il était devenu inutile de les maintenir, comme le soutenait TDF, alors que l’Autorité les avait rendus obligatoires pour une durée de 11 ans, soit jusqu’au 3 juin 2026 ?

Aux termes de la décision n° 22-D-24 du 6 décembre 2022, rendue publique le 22 décembre 2022, l’Autorité de la concurrence, qui, compte tenu des évolutions constatées sur le marché depuis 2015, a accepté d’examiner la demande de révision des engagements pris par TDF, décide de ne pas faire droit à cette demande en l’absence d’éléments établissant la disparition des préoccupations de concurrence identifiées dans la décision n° 15-D-09 et justifiant de la nécessité de lever les engagements concernés avant leur terme (pt. 89).

De fait, si ouverture du marché il y a eu, c’est essentiellement le fait des opérateurs de téléphonie mobile (MNO) qui ont cédé leurs pylônes aux TowerCo nouvellement crées. En outre, observe l’Autorité, ces sites demeurent en grande partie réservés aux MNO cédants et ne sont donc pas disponibles sur le marché (pt. 71). De sorte que les parts de marché de TDF sur le marché de l’hébergement sur sites pylônes — stables (pt. 82) — demeurent indicatives d’une possible domination (pt. 78) dans la mesure, notamment, où elles sont
significativement supérieures à celles de son plus proche concurrent (pt. 82).

Si la démonstration d’un changement important constitue un élément nécessaire pour obtenir la levée ou la révision d’engagements, il appartient également à l’entreprise qui s’en prévaut d’établir, sur la base d’éléments suffisamment précis et circonstanciés, la disparition effective de l’ensemble des préoccupations de concurrence identifiées dans la décision ayant rendu obligatoires ses engagements. Or, au cas d’espèce, TDF n’a produit aucun élément permettant d’établir la disparition, avant le terme des engagements, des préoccupations de concurrence identifiées dans la décision n° 15-D-09 du 4 juin 2015 (pt. 83). L’Autorité considère ainsi que les éléments apportés par TDF en lien avec la dynamique du marché, notamment ceux relatifs au développement de la mutualisation, revêtent un caractère trop général, imprécis et prospectif (pt. 87).

Pour le surplus, je vous renvoie à la lecture du communiqué de l'Autorité de la concurrence.

INFOS : L’Autorité sanctionne une pratique de prix excessifs et une pratique de discrimination dans le secteur du contrôle technique des poids lourds en Guadeloupe

 

Le 22 décembre 2022, l’Autorité de la concurrence a rendu une décision n° 22-d-26 à la faveur de laquelle, saisie par le ministre de l’économie sur la base d’un rapport d’enquête de la Brigade interrégionale d’enquêtes de concurrence (BIEC) de Antilles-Guyane, elle a sanctionné la société Contrôle Technique Poids Lourds - Antilles Guyane (CTPL-AG), pour avoir abusé de sa position dominante sur le marché du contrôle technique des poids lourds en Guadeloupe entre 2013 et 2018, en mettant en oeuvre deux pratiques contraires à l’article L. 420-2 du code de commerce, dans une affaire purement locale, géographiquement limitée à un territoire ultramarin et donc dans laquelle le droit de l’Union n’était pas appelé à s’appliquer (pt. 149).

Constatant que la société CTPL-AG a exploité le seul centre de contrôle technique agréé en Guadeloupe, de mars 2010 à fin septembre 2018 et qu’elle  était de ce fait en monopole durant la période des faits reprochés sur le marché du contrôle technique des poids lourds en Guadeloupe, et accessoirement sur les îles Saint-Martin, Saint Barthélémy et Marie Galante, la Désirade et les Saintes, l’Autorité en a logiquement déduit qu’elle était en position dominante sur ce marché (pt. 173).

En premier lieu, la société CTPL-AG, en position dominante sur le marché des prestations de contrôle technique, s’est rendue responsable d’un ensemble de pratiques discriminatoires à l’égard des sociétés actives sur le marché connexe de la présentation au contrôle technique des poids lourds en Guadeloupe. Sur ce marché, sont, par exemple, actives des entreprises qui exercent une activité de contrôle des systèmes embarqués des poids lourds, et qui peuvent également, à la suite de ces contrôles, présenter ceux-ci au contrôle technique, au nom de leurs clients. La société CTPL-AG a favorisé, sur ce marché, sa société sœur, la société Standard Tachy Achilles-Guyane (STAG), en lui consentant des prix, des délais de paiement et de rendez-vous et des modalités de facturation plus favorables qu’à ses concurrents (pt. 194). Ces différences de traitement, qui constituaient pour les entreprises concurrentes de STAG un désavantage, étaient de nature à affecter leur position concurrentielle (pts. 208 et 210).

En second lieu, la société CTPL-AG s’est appuyée sur sa position dominante sur le marché des prestations de contrôle technique pour pratiquer des tarifs excessifs sur ses prestations de contrôle technique des poids lourds, sans rapport raisonnable avec leur valeur économique, tarifs qu’elle n’aurait pas pu pratiquer sur un marché concurrentiel (pt. 249). La disproportion manifeste entre les tarifs et les coûts a été démontrée par l’évolution du niveau des tarifs et l’ampleur des marges réalisées par la société CTPL-AG sur la période (pt. 224).
 
Aucune justification objective n’a pu être apportée par la société à ces deux pratiques (pts. 209 et 225-226).

Après mise en œuvre de la procédure de transaction, la société CTPL-AGa écopé d’une sanction de 25 000 euros.

Sur la sanction, alors que l’Autorité retient que les pratiques revêtent une gravité certaine, elle estime, au stade de l’individualisation de la sanction, qu’il convient de prendre en considération le fait que CTPL-AG a des revenus limités, en particulier en dehors de son activité de contrôle technique de poids lourds. Pendant la période des pratiques, entre 86 % et 88 % du chiffre d’affaires de CTPL-AG était lié à l’activité de contrôle technique de poids lourds. En 2020, dernier exercice comptable disponible, cette part s’élevait à 62 %. Ces éléments sont de nature à justifier une adaptation à la baisse du montant de la sanction. Si l’on comprend bien, l’Autorité retient ici, sans le dire, une situation qui s’apparente à celle d’une entreprise mono-produit, afin de diminuer le montant de la sanction.

Compte tenu de la gravité des pratiques mises en œuvre et des enjeux de vie chère pour la Guadeloupe, on peut penser que l’entreprise sanctionnée s’en tire plutôt bien. Mais elle n’est pas à l’abri d’actions privées en réparation du dommage concurrentielle subi par les concurrents de sa sœur sur le marché connexe de la présentation au contrôle technique des poids lourds en Guadeloupe, s’agissant de la pratique de discrimination, mais aussi du dommage concurrentiel subi par les entreprises de transport — et notamment les plus petites d’entre elles — victimes de la pratique de prix excessifs.

Pour le surplus, je vous renvoie à la lecture du communiqué de l'Autorité de la concurrence.

INFOS : L’Autorité émet des réserves sur le mécanisme d’équilibrage prévu dans le projet d’arrêté modificatif relatif à la procédure d’agrément et portant cahier des charges des éco-organismes de la filière des emballages ménagers

 

À la suite de la publication au Journal officiel daté du 13 décembre 2022 de l’arrêté du 26 juillet 2022 portant modification de l'arrêté du 29 novembre 2016 modifié relatif à la procédure d'agrément et portant cahier des charges des éco-organismes de la filière des emballages ménagers et à la suite de la mise en ligne le 16 décembre 2022 dans le bulletin officiel du ministère de la transition écologique de l'annexe au présent arrêté, l’Autorité a rendu public le 19 décembre 2022 l’avis n° 22-A-05 du 16 juin 2022 qu’elle a rendu à la demande du ministre de l’économie à propos du mécanisme d’équilibrage prévu par le projet d’arrêté modificatif relatif à la procédure d’agrément et portant cahier des charges des éco-organismes de la filière des emballages ménagers.

Au terme du présent avis, l’Autorité de la concurrence émet un avis réservé sur le mécanisme d’équilibrage prévu par le projet d’arrêté modificatif soumis à son examen.

Ce mécanisme d’équilibrage instaure, entre les éco-organismes, une juste répartition de leurs obligations relatives à la reprise et au recyclage de certains flux, à due proportion de leur part de marché respective en amont. Le projet d’arrêté prévoit également que les modalités de mise en œuvre de ce mécanisme d’équilibrage seront définies par une convention conclue entre les éco-organismes, à l’exception des conditions servant de base au calcul du mécanisme d’équilibrage et des conditions de reprise de tonnages excédentaires, prévues par le projet d’arrêté.

L’instauration de ce mécanisme d’équilibrage s’intègre dans une réorganisation générale de la filière prévue par l’arrêté du 15 mars 2022, lequel instaure une exclusivité en faveur des éco-organismes en prévoyant que ceux-ci organisent la reprise de certains flux de déchets d'emballages afin d'en améliorer le recyclage. Si l’Autorité n’a pas été formellement saisie de l’arrêté du 15 mars 2022 qui confère aux éco-organismes une exclusivité pour l’organisation de la reprise et du recyclage de certains flux de déchets d’emballages ménagers plastiques, elle observe que le mécanisme d’équilibrage prévu dans le projet d’arrêté, en découle directement. Dès lors et quoique l’élaboration de l’arrêté du 15 mars 2022 n’ait pas été soumis initialement à son examen, l’Autorité de la concurrence entreprend, dans le cadre du présent avis, d’examiner les conséquences sur la filière de l’exclusivité instaurée par l’arrêté du 15 mars 2022. À cet égard, elle émet un avis également réservé.

S’agissant d’abord de l’exclusivité accordée par l’arrêté du 15 mars 2022 aux éco-organismes pour la reprise de certains déchets, l’Autorité relève que cette exclusivité pour l’organisation de la reprise, associée à un volume important de déchets, en ce qu’elle permet aux éco-organismes d’opérer un contrôle complet des approvisionnements et des débouchés de la matière plastique non encore valorisée, est susceptible d’entraîner le verrouillage ou le cloisonnement de la filière du matériau plastique. En effet, cette exclusivité est susceptible de restreindre la concurrence entre les opérateurs de la reprise, de limiter le choix des collectivités territoriales dans leurs options de reprise et de priver ces dernières du profit généré par la commercialisation de ces déchets. Toutefois, précise l’Autorité, l’objectif poursuivi par l’exclusivité est de parvenir rapidement à des résultats significatifs en termes de valorisation des déchets d’emballages ménagers plastiques par le développement d’une véritable filière industrielle du tri et du recyclage. Dans ces conditions, l’exclusivité apparaît à la fois nécessaire, en raison du pouvoir de structuration des investissements des éco-organismes qui ne paraît pas pouvoir être réalisée utilement à court-moyen terme sans leur intervention (pt. 67), et proportionnée, en ce qu’elle ne concerne que certaines catégories de déchets encore non ou peu valorisables (pt. 70).

En conséquence, l’Autorité recommande de modifier le projet d’arrêté afin que soit insérée une disposition sur la durée de l'exclusivité pour l’organisation de la reprise et que l'application de cette exclusivité n'aille pas au de là de la future période d'agrément, soit au maximum en fin d’année 2029. En tout état de cause, l'Autorité recommande qu'une clause de revoyure soit insérée dans le projet d’arrêté afin de permettre, sur la base d’un audit qui devra être réalisé en 2025, d’examiner les capacités industrielles de tri, de sur-tri et de recyclage de la filière et d’analyser l'opportunité de maintenir une clause d'exclusivité.

S’agissant ensuite du mécanisme d’équilibrage, la mesure, à la supposer nécessaire, ne paraît pas proportionnée en ce qu’elle conforte la part de marché très élevée du groupe Citeo dans un contexte de fortes barrières à l’entrée sur les marchés concernés. Dès lors que le mécanisme d’équilibrage « garantit que chacun des titulaires assure l’organisation de la reprise et du recyclage de ces flux à due proportion de sa part de marché amont », le groupe Citeo détiendrait automatiquement, par le jeu du mécanisme, une part de marché supérieure à 99,5 % sur le marché aval de la reprise et du recyclage, nouvellement ouvert aux éco-organismes. Ainsi, le mécanisme d’équilibrage assure au groupe Citeo un quasi-monopole sur le nouveau marché de la reprise et du recyclage des déchets d’emballages ménagers plastiques, à l’instar de celle qu’il détient sur le marché amont de l’adhésion. De surcroît, l’Autorité relève un risque de déséquilibre en faveur du groupe Citeo dans la mise en œuvre du mécanisme d’équilibrage résultant de la définition, par voie de convention entre les éco-organismes, des modalités de mise en œuvre et opérationnelles du mécanisme.

Estimant que ces barrières à l’entrée représentent des freins au développement des nouveaux entrants et, in fine, confortent la position de l’opérateur historique sur le marché amont, qui risque d’être dupliquée sur le marché aval par le jeu du mécanisme d’équilibrage, l’Autorité recommande, afin de limiter les effets restrictifs de concurrence induits par le mécanisme d’équilibrage :

i) de limiter le bénéfice du mécanisme aux éco-organismes détenant une part de marché amont inférieure à 50 % ;

ii) de prévoir une clause de revoyure afin de permettre l’évaluation des effets       du dispositif sur le marché et d’éventuellement le réajuster ; et
 
iii) d’habiliter l’ADEME à collecter davantage d’informations optimales auprès des acteurs du secteur en lui permettant l’accès rapide aux informations, puis en les mettant à disposition de tous les éco-organismes dans les plus brefs délais. Il conviendrait en particulier d’obtenir davantage de données relatives au marché amont de l’adhésion et à la collecte des déchets, et de les rendre rapidement disponibles pour tous les éco-organismes.

Par ailleurs, l’Autorité recommande de faire contrôler la convention conclue entre les éco-organismes par un organisme indépendant.

Sur certaines de ces préconisations, l’Autorité semble avoir été entendue en tout ou partie par l’administration.

Si l’annexe à l’arrêté du 26 juillet 2022 ne réserve pas le bénéfice du mécanisme d’équilibrage aux seuls éco-organismes détenant une part de marché amont inférieure à 50 %, il en limite cependant les effets. L’annexe prévoit ainsi que le titulaire de contrats conclus avec les collectivités n’est pas tenu de mettre à disposition du titulaire détenant une part de marché amont supérieure à 50 % ces tonnages excédentaires tant que les deux conditions suivantes sont réunies : i) les tonnages collectés par le titulaire ne représentent pas plus de la moitié des tonnages collectés par l’ensemble des titulaires ; ii) la somme des tonnages excédentaires non tenus à disposition par les différents titulaires reste inférieure à 10 % des tonnages collectés par l'ensemble des titulaires. Lorsque cette somme est supérieure à ce seuil, les tonnages excédentaires dépassant ce seuil doivent être tenus à la disposition du titulaire détenant une part de marché amont supérieure à 50 %. La part des tonnages excédentaires devant être tenue à disposition du titulaire détenant une part de marché amont supérieure à 50% par chaque titulaire est calculée au prorata des tonnages excédentaires qu’il a repris.

Par ailleurs, si l’annexe à l’arrêté du 26 juillet 2022 ne prévoit pas de faire contrôler la convention conclue entre les éco-organismes par un organisme indépendant, il envisage cependant de soumettre cette convention pour accord aux ministres chargés de l’environnement et de l’économie. À défaut d’acceptation, ou sur demande motivée de l’un au moins des ministres, l’éco-organisme transmet une proposition révisée prenant en compte leurs observations dans le délai d’un mois à compter de leur réception.

Enfin, l’annexe à l’arrêté du 26 juillet 2022 prévoit que les éco-organismes transmettent chaque année à l’Ademe toute donnée complémentaire pertinente permettant d’évaluer le mécanisme spécifique d’équilibrage visé au présent point et notamment son éventuel impact sur le marché.

Pour le surplus, je vous renvoie à la lecture du communiqué de l'Autorité de la concurrence.

INFOS : L’Autorité rejette pour absence d’éléments suffisamment probants la saisine de quatre radiothérapeutes qui se plaignaient d’avoir été évincés de l’accès au plateau technique d’un centre de radiothérapie de l’Essonne

 

Le 19 décembre 2022, l’Autorité de la concurrence a rendu une décision n° 22-D-25, aux termes de laquelle elle conclut au rejet de la saisine au fond introduite par quatre médecins pratiquant la radiothérapie et bénéficiant de l’accès au plateau technique du Centre de Radiothérapie de Ris-Orangis (CRRO), en vertu de la convention de mise à disposition conclue avec ce centre et qui se plaignaient d’en avoir été évincés au profit d’autre praticiens, non seulement par l’effet d’une pratique discriminatoire constitutive d’un abus de position dominante sur le marché de l’accès au traitement du cancer par radiothérapie externe dont le CRRO aurait le monopole dans le département de l’Essonne, mais également par l’effet d’une pratique concertée entre Almaviva, le CRRO et Perceval, afin de les exclure du marché de l’accès au traitement du cancer par radiothérapie externe.

Pour parvenir à cette conclusion, l’Autorité constate que les faits dénoncés dans la saisine ne sont pas appuyés d’éléments suffisamment probants, ni en ce qui concerne les allégations d’abus de position dominante, ni en ce qui touche à la pratique concertée. La saisine au fond est donc rejetée en application du deuxième alinéa de l’article L. 462-8 du code de commerce. Ce rejet de la saisine au fond entraîne, par voie de conséquence, le rejet de la demande de mesures conservatoires qui accompagnait la saisine au fond.

Sur l’abus de position dominante sur le marché de l’accès au traitement du cancer par radiothérapie externe dont le CRRO aurait le monopole dans le département de l’Essonne, l’Autorité oppose à la saisissante sa pratique décisionnelle constante en vertu de laquelle l’Île-de-France constitue un marché géographique unique, et qu’il n’est pas pertinent de distinguer Paris intramuros des départements voisins. Elle relève en effet que l’Île-de-France se caractérise par une mobilité très importante des patients, compte tenu notamment de l’offre étendue des établissements de soins et l’existence de pôles d’attraction régionale, voire nationale (pts. 43-50). Et la saisine ne contient aucun élément de nature à prouver que le marché de l’accès à la radiothérapie externe concerné par la pratique alléguée se limiterait au seul département de l’Essonne (pt. 51), de sorte que les éléments invoqués dans la saisine pour établir, sur le périmètre proposé de l’Essonne, la détention d’une position dominante par le CRRO, sont inopérants, d’autant que la saisine ne contient aucun autre élément probant susceptible d’étayer l’existence d’une position dominante du CRRO sur un marché plus large que l’Essonne (pt. 52).

Quant à la pratique concertée alléguée — une entente bilatérale entre la société détentrice du plateau technique et la structure au profit de laquelle les quatre radiothérapeutes auraient été évincés —, l’Autorité observe qu’aucun élément du dossier ne permet d’établir un accord de volontés entre les protagonistes préalablement au 31 juillet 2020, date à laquelle le CRRO a résilié unilatéralement la convention de mise à disposition. En outre, les quelques échanges informels qui ont pu avoir lieu entre des médecins de Perceval et le CRRO, pour essentiel postérieurs à la résiliation de la convention entre le CRRO et les saisissants, ne sont pas de nature à démontrer l’existence d’un accord de volontés entre en vue d’évincer les saisissants du plateau technique de Ris-Orangis.

INFOS CONTRÔLE DES CONCENTRATIONS : La décision autorisant la Caisse de dépôt et placement du Québec, active dans le secteur ferroviaire, à prendre le contrôle d’Akiem, société française active dans la location de locomotives, est en ligne (+ 7 décisions simplifiées)

 

Ces derniers jours, l'Autorité de la concurrence a mis en ligne 8 nouvelles décisions d'autorisation d'opérations de concentration, dont 7 décisions simplifiées.

Parmi ces décisions figure la décision n° 22-DCC-226 du 22 novembre 2022 à la faveur de laquelle l’Autorité de la concurrence a autorisé sans condition la Caisse de dépôt et placement du Québec, investisseur institutionnel à long terme qui gère les fonds de ses déposants principalement constitués de régimes de retraite et d’assurance publics et parapublics de la province de Québec au Canada à prendre le contrôle exclusif du groupe Akiem, société française active dans la location de locomotives et de trains de passagers à des opérateurs ferroviaires publics et privés.

Si Akiem propose des services de location ainsi que d’entretien et de maintenance de locomotives, Ermawa, filiale de la Caisse de dépôt et placement du Québec, propose les mêmes services concernant des wagons de marchandises.

Au stade de la délimitation du marché pertinent, l’Autorité s’oriente nettement, même si la question de la définition exacte des marchés est laissée ouverte,  vers une distinction entre l’activité de location de locomotives et celle de location de wagons : l’activité de location de locomotives est bien plus intensive en capital que celle de location de wagons. Elle requiert, en outre, une expertise technique liée au véhicule proposé à la location. En outre, le client est souvent différent. L’Autorité s’oriente également vers la même distinction concernant les marchés de la maintenance.

Sur la délimitation du marché géographique de la location de locomotives, l’Autorité relève que les principaux obstacles en Europe au constat d’une dimension européenne sont techniques et tiennent à l’écartement des voies, à la différence de systèmes de voltages, voire sur la différence de systèmes de signalisation, en sorte que les marchés de la location de locomotives sont de dimension européenne, incluant la Suisse et les états d'Europe de l'Est à l'exception des anciens membres de l'Union Soviétique, ainsi que notamment l'Espagne, le Portugal, le Royaume-Uni, l'Irlande et la Finlande.

Les parties n’étant pas actives sur les mêmes marchés de produits, tout risque d’atteinte à la concurrence par le bais d’effets horizontaux peut être exclu.

La Caisse de dépôt et placement du Québec détenant une participation minoritaire à hauteur de [10-20] % dans le groupe Alstom, s’est posé la question des effets de verrouillage auxquels pourrait conduire le lien vertical entre Alstom, fabricant de locomotives, et Akiem, bailleur de locomotives (et donc acheteur de ces mêmes locomotives), lequel pourrait déboucher sur un scénario dans lequel Akiem devait acquérir ses locomotives exclusivement auprès d’Alstom, privant ainsi les fabricants de locomotives en concurrence avec Alstom d’un client important ou si Alstom vendait ses locomotives uniquement à Akiem, privant ainsi les concurrents d’Akiem d’une source importante d’approvisionnement.

Dans les deux cas, tout risque d’atteinte à la concurrence par le biais d’effets verticaux peut être écarté. Akiem détient une part de marché à l’achat inférieure à 10 % sur le marché européen amont de la fabrication de locomotives de fret, de sorte que toute exclusivité hypothétique d’Akiem vis-à-vis d’Alstom ne priverait les fabricants de locomotives concurrents que d’une part limitée de leurs débouchés. En outre, la CDPQ ne détenant qu’une participation minoritaire dans la société Alstom, elle ne disposerait pas de la capacité de décider seule de la mise en place d’une stratégie visant à restreindre l’accès des concurrents d’Akiem aux locomotives fabriquées par Alstom.

Quant aux risques d’effets congloméraux, envisagés entre les activités de location de wagons et celles de location de locomotives, d’une part, et entre les activités de maintenance de wagons de marchandises et celles de maintenance de locomotives, ils sont également écartés par l’Autorité dans la mesure où la part de l’entité issue de l’opération sur les marchés concernés ne dépasse pas 30 %. Même sur le marché français de la maintenance de wagons de marchandises où les parts de marché d’Ermewa sont légèrement supérieures à 30 %, il existe d’autres acteurs sur ce marché tels VTC, SNCF, Lormafer ou Sogeefer, de sorte qu’Ermewa n’apparaît pas comme un acteur incontournable sur ce marché. Une stratégie consistant, pour la nouvelle entité, à s’appuyer sur cette activité pour développer son activité de maintenance de locomotives n’aurait donc pas un effet significatif sur les marchés en cause.

 



Les 7 décisions simplifiées :

Décision n° 22-DCC-228 du 1er décembre 2022 relative à la prise de contrôle exclusif de la société Vinatis par le groupe Castel ;

Décision n° 22-DCC-230 du 29 novembre 2022 relative à la prise de contrôle exclusif du groupe Étoile Routière par le groupe Malherbe ;

Décision n° 22-DCC-232 du 2 décembre 2022 relative à la prise de contrôle exclusif de la société Enyom Distribution par la société LBO France Gestion ;

Décision n° 22-DCC-234 du 7 décembre 2022 relative à la prise de contrôle exclusif de la société SMI par le groupe Dubreuil ;

Décision n° 22-DCC-235 du 14 décembre 2022 relative à la prise de contrôle conjoint de la société Logistic’oeuf par le groupe Pampr’oeuf et le groupe Terrena ;

Décision n° 22-DCC-236 du 1er décembre 2022 relative à la prise de contrôle conjoint de la société Cejean par les sociétés Charlever et ITM Entreprises ;

Décision n° 22-DCC-237 du 1er décembre 2022 relative à la prise de contrôle conjoint des sociétés Leman Daitomi et Tomiya par les sociétés Toscane et ITM Entreprises.

EN BREF : Virginie Beaumeunier quitte la tête de la DGCCRF

 

Elle l’a annoncé elle-même par un post diffusé le 22 décembre 2022 sur Linkedin, Virginie Beaumeunier quitte son poste de directrice générale de la concurrence de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) : « J’ai le plaisir de vous annoncer qu’après 5 années exaltantes à la tête de la DGCCRF, je suis nommée aujourd’hui inspectrice générale des finances. Une nouvelle étape dans ma vie professionnelle où m’attendent sans aucun doute des missions enrichissantes avec des collègues stimulants. Très honorée de cette nomination ! »

Pour l’heure, pas encore de communiqué de presse de la DGCCRF ou du ministère de l’économie…

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