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L'actualité la plus récente du droit de la concurrence
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n° 1/2020
février 2020
SOMMAIRE
 
INFOS : Le Sénat propose à son tour de lutter contre les acquisitions dites « prédatrices », laissant le Conseil d’État sceptique

INFOS : Les décisions sanctionnant Google pour l’opacité des règles de fonctionnement de sa plateforme publicitaire Google Ads, appliquées de manière inéquitable et aléatoire, et les principaux émetteurs de titres-restaurant pour deux ententes sont en ligne

INFOS : Le régulateur marocain des télécoms sanctionne l’opérateur historique Maroc Télécom à hauteur de 310 millions d’euros pour avoir abuser de position dominante dans la mise en œuvre du dégroupage de la boucle locale et lui impose, via des injonctions et sous astreintes, une ouverture à la concurrence du marché du haut débit fixe

INFOS CONTRÔLE DES CONCENTRATIONS : L'Autorité de la concurrence met en ligne 33 nouvelles décisions d'autorisation, dont 21 décisions simplifiées

ANNONCE COLLOQUE : « Actualité du droit de la concurrence et de la distribution : que retenir de 2019 pour mieux décider en 2020 ? », Paris — 26 février 2020 [message de Virginie Bernard et Emmanuel Dieny]

ANNONCE COLLOQUE : « Quels modèles de la concurrence dans l'économie numérique ? La parole aux acteurs », Rennes — 6 mars 2020 [message d’Aziz Mouline et de Kélig Bloret-Dupuis]

INFOS : Le Sénat propose à son tour de lutter contre les acquisitions dites « prédatrices », laissant le Conseil d’État sceptique



Parallèlement aux travaux de la Commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale sur le droit européen de la concurrence face aux enjeux de la mondialisation, le Sénat a engagé à son tour une réflexion sur la lutte contre les acquisitions dites « prédatrices ».

Ainsi, l'article 7 d’une proposition de loi visant à garantir le libre choix du consommateur dans le cyberespace, présentée par la sénatrice Sophie Primas, présidente de la Commission des affaires économiques du Sénat, envisage de permettre à l'Autorité de la concurrence d'évoquer les acquisitions effectuées par les entreprises « structurantes ». Celles-ci auraient l'obligation d'informer l'Autorité de toute acquisition, selon un mécanisme inspiré de ce qui existe en Norvège depuis 2014.

À la suite de l’avis du Conseil d’État sur la proposition de loi, le texte initial a été sensiblement amodié en Commission des affaires économiques. Il est vrai que, sur cette disposition en particulier, le Conseil d’État se montre pour le moins sceptique. S’il trouve louable l’objectif poursuivi, il émet des doutes sur l’effet utile du dispositif.

Par ailleurs, il formule certaines critiques. À cet égard, la proposition initiale envisageait de confier à l’Autorité de la concurrence le soin d’établir une liste des « entreprises structurantes » soumises à une obligation d’information préalable en cas d’opération de concentration en deçà des seuils de notification, mais sans définir le moindre critère objectif !!! Et le Conseil d’État de suggérer au Sénat de regarder du côté des législations allemande et autrichienne pour s’inspirer des critères qui ont été retenus (pt. 49).

Par ailleurs, le Conseil d’État suggère une adaptation de la notion d’atteinte à la concurrence prévue au premier alinéa de l’article L. 430-6 du code de commerce par la mobilisation des notions d’équité et de choix suffisant (pt. 48).

Enfin, le Conseil d’État semble considérer que le niveau national n’est pas le plus approprié. Il souligne à cet égard que l’objectif de protection des intérêts des utilisateurs et de consommateurs de services numériques offerts sur un marché mondial serait susceptible d’être mieux atteint par l'adoption de nouvelles dispositions par l'Union européenne en matière de services de communication au public en ligne et de concurrence (pt. 50).

Prenant acte des observations du Conseil d’État, la Commission des affaires économiques du Sénat a adopté plusieurs amendements visant à substituer au terme d’« entreprises systémiques », considéré comme inadapté tant par le Conseil d’État que par de nombreuses personnes auditionnées, le terme d’« entreprises structurantes », mais aussi à soumettre le pouvoir reconnu à l’Autorité de la concurrence d’établir une liste des « entreprises structurantes » soumises à une obligation d’information au respect de critères plus ou moins objectifs permettant de se focaliser sur les entreprises du numérique les plus importantes aux niveaux français et européen ou mondial.

Si le dispositif envisagé concerne donc avant tout les plateformes numériques, les termes assez généraux utilisés et le caractère alternatif des critères proposés pourrait permettre de viser toutes les entreprises « structurantes » sans distinction…

En pratique, les « entreprises structurantes » mentionnées sur la liste établie par l’Autorité de la concurrence seraient tenues de l’informer des opérations de concentration au sens de l’article L. 430-1, par hypothèse non notifiable, susceptible d’affecter le marché français dans un délai d’un mois avant sa réalisation. L’Autorité pourrait alors enjoindre à l’entreprise de notifier l’opération et de se soumettre, avant la réalisation de l’opération, à la procédure prévue aux articles L. 430-3 à L. 430-10 du code de commerce.

En cas de passage en phase II, il y aurait renversement de la charge de la preuve, l’entreprise structurante étant tenue d’apporter la preuve que l’opération n’est pas de nature à porter atteinte à la concurrence pour pouvoir la mettre en œuvre.

Si l’on peut comprendre, voire soutenir la volonté du législateur de lutter contre les acquisitions « prédatrices », on saisit mal en revanche l’utilité d’un tel renversement de la charge de la preuve. L’Autorité, qui traite plus de 200 opérations chaque année, parfois très complexes, ne dispose-t-elle pas des moyens et des compétences pour identifier les atteintes à la concurrence ? À cela s’ajoute une rupture d’égalité entre les entreprises structurantes selon que  l’opération envisagée se trouve au-dessus ou en deçà des seuils…

INFOS : Les décisions sanctionnant Google pour l’opacité des règles de fonctionnement de sa plateforme publicitaire Google Ads, appliquées de manière inéquitable et aléatoire, et les principaux émetteurs de titres-restaurant pour deux ententes sont en ligne

 

Commençons par la décision n°19-D-26 du 19 décembre 2019 à la faveur de laquelle l’Autorité a sanctionné Google à hauteur de 150 M€ pour abus de position dominante.

On le subodorait à la lecture du communiqué de l’Autorité. On en a la confirmation à la suite de la lecture de la décision elle-même : la façon dont Google a mis en œuvre les engagements souscrits dans le cadre de l’affaire Navx en 2010, à propos, on s’en souvient, des dispositifs de contournement des contrôles routiers en France, est restée en travers de la gorge de l’Autorité. Pour mémoire, à l’article 2 du dispositif de la décision n° 10-D-30 du 28 octobre 2010 relative à de pratiques mises en œuvre dans le secteur de la publicité en ligne, l’Autorité avait donné acte de ce que, en pratique, Google s’engageait à appliquer à tous les contenus et à toutes les règles du service AdWords, dans tous les pays concernés par ce service, le principe des améliorations et clarifications apportées en application des engagements souscrits dans cette décision.

Pour l’Autorité, la présente affaire, qui concerne principalement les règles de fonctionnement de la plateforme publicitaire Google Ads telles qu’appliquées aux sites d’annuaire inversé, constitue la confirmation que Google n’a pas mis en œuvre les engagements souscrits il y a dix ans.

Si l’édiction de règles visant à interdire les sites malveillants qui peuvent porter atteinte à l’intérêt des consommateurs n’est en rien critiquable dans son principe, ces règles doivent être définies et appliquées de manière objective, transparente et non-discriminatoire. Or, il apparaît que la portée précise de chaque règle manque de clarté, ce qui laisse la vérification de leur respect et la possibilité de les modifier à la discrétion entière de Google. En outre, il apparaît que l’application pratiques de ces règles aux éditeurs de sites web était discriminatoire, établissant des différences de traitement entre des opérateurs placés dans des situations comparables et en adoptant, à l’égard des mêmes annonceurs, des revirements de position renforçant l’opacité des règles. Les équipes commerciales de Google auraient ainsi « accompagné » dans leurs développement des sites qui, auparavant, avaient été suspendus pour des manquements à des règles destinées à protéger les internautes.

Relevant que si, d’un point de vue institutionnel, il est de l’intérêt de Google de pouvoir montrer qu’elle se conforme aux prescriptions des pouvoirs publics en matière de protection des consommateurs, ou aux engagements destinés à clarifier ses Règles spontanément proposés à l’Autorité dans l’affaire Navx, l’Autorité suggère à l’inverse que Google aurait intérêt, d’un point de vue commercial, à entretenir l’opacité des règles visant à interdire les sites malveillants, dans la mesure où elle lui permettrait de maximiser ses revenus publicitaires à l’égard de l’ensemble des annonceurs, quitte à accepter la promotion de sites susceptibles de nuire au consommateur sur la plateforme Google Ads, tant que cela ne conduit pas à des pertes de revenus liées à une désaffection des utilisateurs qui excéderaient ce gain (pt. 373).

Mais c’est au stade du calcul de la sanction pécuniaire que le rappel du défaut du respect des engagements souscrits prend tout son sens. En effet, pour justifier que l’on écarte la méthode de calcul retenue par la communication des griefs de 2011 pour adopter une méthode forfaitaire, l’Autorité indique que les problèmes de concurrence relatifs à la clarté et à l’application des Règles aux éditeurs de sites ne constituent pas un sujet nouveau pour Google. Et celle-ci de rappeler les deux décisions Navx de 2010 rendant obligatoires des engagements destinés à clarifier la politique de contenus à l’égard des annonceurs présents dans le secteur des dispositifs de contournement des contrôles routiers (pt. 536). Ainsi, note l’Autorité, le contexte dans lequel les présentes pratiques s’inscrivent montre l’importance de la fonction dissuasive de la sanction qui doit être infligée à Google (pt. 535). Bref, le fait que Google n’a pas mis en œuvre les engagements souscrits en 2010 impose de lui infliger aujourd’hui une sanction exemplaire répondant à l’impératif de répression et dissuasion.

Ainsi, le comportement aujourd’hui sanctionné a pris place alors même que Google a été régulièrement alertée sur l’importance du respect des règles de concurrence, à l’instar de l’Autorité, qui, depuis 2010, a précisé à plusieurs reprises les conditions dans lesquelles ces règles devaient être définies et appliquées par Google dans des décisions d'octroi ou de rejet de mesures conservatoires, d'engagements ou de rejet pour défaut d'éléments probants (pt. 543). En fin de compte, l’Autorité estime que, eu égard à la gravité avérée des faits, à l’importance certaine du dommage causé à l’économie, et à la puissance économique de l’entreprise en cause, il y a lieu d’infliger aux sociétés Google LLC, Google Ireland Ltd et Google France, sociétés auteurs de l’infraction, une sanction pécuniaire de 150 M€, dont 72 M€ conjointement et solidairement avec la société Alphabet Inc., en qualité de société mère depuis le 2 octobre 2015 (pt. 561).

Par ailleurs, l’Autorité enjoint à Google de prendre les mesures nécessaires pour faire cesser les infractions toujours en cours à la date de la présente décision et de permettre le rétablissement effectif de la situation concurrentielle sur les marchés affectés par les pratiques. Ces injonctions consistent notamment à clarifier les règles Google Ads, en vue de remédier à leur manque d’objectivité et de transparence et à modifier les procédures de suspension de compte appliquées par Google, afin d’éviter que celles-ci revêtent un caractère brutal et injustifié. Google doit également mettre en place des procédures d’alerte, de prévention, de détection et de traitement des manquements à ses règles, afin que les mesures de suspension de sites ou de comptes Google Ads soient strictement nécessaires et proportionnées à l’objectif de protection du consommateur (pts. 564-565). Ces injonctions s’appliquent uniquement sur le marché français (pt. 586) et s’appliqueront jusqu’au 1er janvier 2025. La décision prévoit également des mesures de suivi des injonctions (pts. 588-589). Enfin, l’Autorité ordonne la publication du résumé de la décision.

L’importance accordée par la présente décision au défaut du respect des engagements souscrits par Google en 2010 dans l’affaire Navx lors du calcul de la sanction pécuniaire suscite un certain malaise. La réitération des pratiques ne pouvant être mise en œuvre en l’absence de décision préalable constatant une infraction, on s’interroge sur les raisons pour lesquelles l’Autorité de la concurrence n’a pas jugé bon d’ouvrir en amont une procédure pour violation des engagements souscrits en 2010, alors même qu’elle reconnaît que, dès 2013, elle a émis des doutes sur le dispositif mis en place par Google en 2010, s’interrogeant sur la portée pratique donnée par Google aux engagements, pris volontairement dans le cadre de l’affaire Navx, d’étendre les améliorations et clarifications apportées par les engagements répondant aux préoccupations de l’Autorité en ce qui concerne le secteur des bases de données de radars à l’ensemble de ses politiques et contenus Adwords. L’Autorité s’interrogeait également en 2013 sur l’interprétation que fait Google des circonstances de risque grave et immédiat qui justifieraient le non-respect de la procédure prévu par l’engagement n° 4, estimant qu’une interprétation trop large de ces éléments pourrait conduire Google à considérer qu’en cas de violation par le client des règles contractuelles, elle ne serait pas tenue par ladite procédure. Elle relevait aussi qu’« une interprétation par trop restrictive, à l’égard de tel ou tel acteur du marché, de l’engagement dont il a été  donné acte à Google par l’article 2 de la décision n° 10-D-30 du 28 octobre 2010 serait susceptible de soulever de la part de l’Autorité de la concurrence des préoccupations sur l’apparition de possibles distorsions de concurrence ».

Ce qui préoccupant dans cette situation, quoi que l’on pense par ailleurs des mérites du présent cas, c’est que l’Autorité présume la violation des engagements souscrits en 2010, laquelle violation appelle, selon elle, une sanction exemplaire dans la présente affaire, de nature à répondre à l’impératif de répression et dissuasion, alors même que la violation des engagements souscrits, seulement affirmée dans la présente décision, n’a pas été démontrée au terme d’une procédure ad hoc au cours de laquelle Google aurait été en mesure de faire entendre son point de vue. Or, il apparaît à l’évidence qu’en l’absence du précédent de l’affaire Navx, la sanction pécuniaire infligée par l’Autorité n’aurait pas été de cette ampleur, si tant est que cette dernière soit seulement entrée en voie de sanction…

 



Passons à présent à la décision n° 19-D-25 du 17 décembre 2019 à la faveur de laquelle l’Autorité a infligé des sanctions d’un montant total de près de 415 M€ aux quatre émetteurs historiques de titres-restaurant, ainsi que leur organisme commun, la Centrale de Règlement des Titres (CRT), pour leur participation à deux ententes.

Le secteur des titres-restaurant présente les caractéristiques d’une plateforme biface sur laquelle les émetteurs de titre (TR) mettent en relation les salariés, détenteur des TR acquis auprès de leurs employeurs, et les commerçants qui acceptent ces titres comme moyen de paiement, qu’ils se font rembourser par les émetteurs de titres, moyennant le paiement d’une commission

Aux termes de la présente décision, l’Autorité sanctionne en premier lieu, après avoir refusé d’ouvrir une procédure d’engagements sollicitée par la CRT (pts. 353-364) des échanges d’informations entre les membres-sociétaires organisé par l’intermédiaire de la CRT (pt. 467), mais ne constituant pas pour autant une pratique unilatérale de la CRT (pt. 470).

De fait, entre 2010 et 2015, les membres-sociétaires de la CRT, c’est-à-dire Edenred France, Up, Natixis Intertitres et Sodexo Pass France, se sont échangés, tous les mois, des informations relatives à leurs parts de marché individuelles calculées à partir du nombre de titres traités le mois précédent par la CRT. Ces échanges transitaient par la CRT qui assurait la communication des informations par courriel unique au début de chaque mois.

La structure particulière du marché — marché oligopolistique très concentré, la part de marché cumulée des émetteurs historiques s’elevant de 98,5 % (pts. 487-488), marqué pendant la période examinée par une forte stabilité avec un faible taux d’attrition des clients (perte de clientèle) liée notamment à l’existence de plusieurs barrières à l’entrée et une transparence tarifaire face acceptation — ont pu faciliter la coordination des membres-sociétaires et le maintien de la coordination (pt. 509). Quant à la nature des informations échangées et les modalités de l’échange, l’Autorité considère que compte tenu de la structure du marché, de la fréquence mensuelle des échanges, du niveau de désagrégation des données échangées, de la confidentialité des données échangées et de leur absence d’historicité, ces données avaient une utilité stratégique certaine pour les émetteurs (pt. 530). Ces échanges d’informations ont accru la transparence du marché en indiquant à chaque émetteur sa part de marché individuelle face acceptation ainsi que celle de chacun de ses trois concurrents. Grâce à ces informations, chaque émetteur pouvait apprécier la ligne stratégique de ses concurrents, face émission. En d’autres termes, chacun était en mesure de détecter tout changement de stratégie tarifaire et donc de dissuader tout comportement agressif de la part de l’un d’entre eux (pt. 531). Dans le contexte particulier du marché des TR, où les quatre émetteurs mis en cause détiennent la quasi-totalité des parts de marché, sont réunis au sein d’une structure commune, i.e. la CRT, où l’inertie des entreprises-clientes, telle qu’attestée par la relative stabilité des parts de marché individuelles, et a fortiori de leur part de marché cumulée, est grande, où le taux d’attrition est faible et enfin où existe déjà une transparence tarifaire forte face acceptation, l’échange d’informations était particulièrement nocif. En effet, il ne reste que peu de marge pour que la concurrence puisse s’exprimer sans être immédiatement visible. Ainsi, sur un tel marché, le seuil de sensibilité, déjà notablement bas, a été fortement réduit par les pratiques (pt. 532), de sorte que les échanges d’informations au cas d’espèce ont contribué à diminuer l’incertitude sur le marché oligopolistique des titres-restaurant et ont donc été susceptibles de réduire l’autonomie commerciale des opérateurs concernés (pt. 533).

L’Autorité sanctionne en second lieu, le verrouillage par la CRT et ses membres-sociétaires du marché des titres-restaurant par le biais de dispositions statutaires, réglementaires et protocolaires relatives au fonctionnement de la CRT. En clair, entre 2002 et 2018, la CRT et ses membres-sociétaires ont d’abord organisé un contrôle de l’accès des émetteurs à la CRT, alors que l’adhésion à celle-ci, qui joue le rôle de guichet unique, est une condition du traitement des titres papier (pt. 618). Tout d’abord, les conditions relatives à l’adhésion à la CRT fixées par ses statuts et son règlement intérieur étaient non objectives et non transparentes. Elles laissaient une marge de manœuvre discrétionnaire à la CRT et à ses membres-sociétaires pour apprécier qui pouvait y adhérer et obtenir un accès à un traitement papier utilisé par la grande majorité des commerçants.

Par ailleurs, les membres-sociétaires de la CRT se sont entendus pour contrôler le développement des titres dématérialisés, sous forme de cartes ou d’application mobiles, en s’interdisant, jusqu’en 2012, de développer en dehors de la CRT une plateforme de traitement des titres-restaurant dématérialisés, sous la menace d’une sanction d’un montant égal à 10 % de sa quote-part annuelle à la CRT (pt. 630). Visant à limiter l’innovation des membres-sociétaires le second volet de cette entente s’inscrit dans une logique de verrouillage du marché et se révèle, dès lors, complémentaire à celui du verrouillage du marché des titres-restaurant par les Statuts et le règlement intérieur de la CRT (pt. 636). Ce faisant, l’entente entraînait une cristallisation des positions et des clientèles, en donnant à chaque émetteur l’assurance qu’aucun de ses trois concurrents ne participerait au développement d’un système d’acceptation de titres dématérialisés en dehors de la CRT, et, l’assurance d’être tenu au courant, en qualité de membre-sociétaire de la CRT, de l’avancée du projet de développement d’un tel système d’acceptation de titres dématérialisés au sein de la CRT (pt. 639). La combinaison des deux volets de l’entente rendait aussi plus ardue l’entrée de nouveaux acteurs sur le marché souhaitant se positionner sur les solutions dématérialisées. En effet, ils auraient pu établir une base de clientèle sur support papier avant de basculer ensuite vers la forme dématérialisée (pt. 653).

Au final, l’Autorité a considéré que l’Accord constituait une pratique anticoncurrentielle par objet permettant le verrouillage du marché par le contrôle de l’entrée de nouveaux émetteurs sur le marché (premier volet) et, au sein du marché, par les freins au développement de titres dématérialisés par les émetteurs (second volet) (pt. 654).

S’agissant du calcul des sanctions infligées, l’Autorité considère que la gravité des échanges d’information est d’une gravité limitée (pt. 741) et que le dommage à l’économie est certain, mais limité justifiant de retenir une proportion de 6 % de la valeur retenue comme assiette du montant des sanctions pécuniaires (pt. 761).

En revanche, la proportion retenue de la valeur fixée comme assiette du montant des sanctions pécuniaires pour la deuxième entente de verrouillage du marché des titres-restaurant et spécialement du développement des titres dématérialisés passe à 14 % (pt. 845). Il est vrai que l’Autorité estime que les pratiques en cause sont d’une gravité certaine (pt. 827).

Par ailleurs, l’Autorité de la concurrence estime que la situation financière propre à l’entreprise, à savoir son appartenance à un groupe important, impose d’augmenter de 70 % le montant de base de la sanction pécuniaire infligée à Sodexo Pass France, solidairement avec sa société mère Sodexo (pts. 779 et 863) et de 50 % le montant de base de la sanction pécuniaire infligée à Natixis Intertitres, solidairement avec sa société mère Natixis (pts. 783 et 867).

En outre, l’Autorité prend en compte la réitération des pratiques. Toutefois, alors qu’elle ne retient qu’une majoration de 20 % pour les échanges d’information, elle fixe à 30 % la majoration pour réitération s’agissant de l’entente de verrouillage du marché des titres-restaurant. Il est vrai que dans le premier cas, la période écoulée entre la décision n° 01-D-41 du 11 juillet 2001, première décision de sanction à l’égard de trois des émetteurs historiques, et le début des pratiques aujourd’hui sanctionnées était de 9 ans (pt. 793), alors qu’il n’était que de 7 mois, dans le second cas, de sorte que les émetteurs étaient parfaitement informés des règles de concurrence enfreintes pour lesquelles ils venaient d’être sanctionnés (pt. 872).

L’autorité a également reconnu la faible capacité contributive d’un des émetteur, diminuant d’environ un tiers le montant des sanctions à lui infligées.

Quant à la CRT, association régie par la loi du 1er juillet 1901, elle écope de sanctions pour un montant global de 3M€.

En sus des sanctions pécuniaires infligées, l’Autorité enjoint à Edenred France, Up, Natixis Intertitres et Sodexo Pass France de publier un résumé de la décision dans l’édition papier et dans l’édition en ligne du journal Les Échos, la revue 60 millions de consommateurs et la revue Neo-Restauration. Par ailleurs, il est enjoint à ces dernières et à la CRT de modifier les statuts et le règlement intérieur de la CRT afin de les mettre en conformité avec le droit de la concurrence.

Pour le surplus, je vous renvoie à la lecture du communiqué de l'Autorité de la concurrence.

INFOS : Le régulateur marocain des télécoms sanctionne l’opérateur historique Maroc Télécom à hauteur de 310 millions d’euros pour avoir abuser de position dominante dans la mise en œuvre du dégroupage de la boucle locale et lui impose, via des injonctions et sous astreintes, une ouverture à la concurrence du marché du haut débit fixe

 

Le 17 janvier 2020, le régulateur sectoriel marocain des télécoms — l’Agence nationale de réglementation des télécommunications (ANRT) — a adopté une décision historique à plus d’un titre, la décision ANRT/CG/n°01/2020.

Au terme de ce qui semble être la première décision faisant application du droit des pratiques anticoncurrentielles au Maroc, introduit par la loi n° 104-12, l’ANRT, qui est compétente pour appliquer le droit de la concurrence dans ce secteur au Maroc, sanctionne l’opérateur historique Maroc Télécom à hauteur de 310 millions d’euros (3,3 milliards de DH) pour avoir abuser de sa position dominante dans la mise en œuvre du dégroupage de la boucle locale.

Cette décision fait suite à la saisine de l’ANRT par Wana, aujourd’hui Inwi, deuxième opérateur sur le marché de l’internet mobile, laquelle dénonçait de nombreuses pratiques mises en œuvre par Maroc Télécom pour faire obstacle au dégroupage de son réseau de boucle locale et, ainsi, au développement de la concurrence pour le haut débit fixe au Maroc.

De fait, alors que le dégroupage devrait être effectif depuis près de 12 ans (pt. 11), Maroc Télécom dispose encore à ce jour d’une part de marché de 99,92 % sur les offres de détail ADSL au Maroc (pt. 37). Il faut dire que l’opérateur historique n’a rien fait pour ouvrir à ses concurrents la boucle locale à alors qu’il était tenu. La présente décision, qui adopte un raisonnement très proche de celui qui a été développé en pareils cas par les autorités de concurrence françaises, espagnoles et européennes, dans la pratique décisionnelle est abondamment citée, comporte une longue litanie des abstentions, retards, comportements dilatoires et discriminatoire mis en œuvre par Maroc Télécom et jusque et y compris l’application d’un ciseau tarifaire entre les prix de gros et ses prix de détail, en violation des dispositions réglementaires et dans le but de faire obstruction au libre accès concurrentiel au marché.

Considérant que les pratiques dénoncées par Wana traduisent une violation du droit de la concurrence, l’ANRT a imposé à Maroc Télécom, au regard de la gravité particulière de son comportement (pts. 213-215) et du dommage causé à l’économie et aux consommateurs (pts. 216-227), une sanction de près de 10 % de son chiffre d’affaires mondial (plafond légal). Par ailleurs, l’Agence impose à l’opérateur historique de nombreuses injonctions sous astreinte (art. 16) visant à déverrouiller immédiatement le marché, et dont elle a relevé qu’il avait été gravement affecté par ces comportements.

Selon le communiqué de presse de l’ANRT du 2 février 2020, l’objectif de ces injonctions est de remédier aux comportements constatés et de permettre le développement de la concurrence sur le segment du haut débit fixe (voix et Internet) de nature notamment à bénéficier davantage, à l’instar du mobile, aux consommateurs et aux entreprises.

INFOS CONTRÔLE DES CONCENTRATIONS : L'Autorité de la concurrence met en ligne 33 nouvelles décisions d'autorisation, dont 21 décisions simplifiées

 

Ces derniers jours, l'Autorité de la concurrence a mis en ligne 33 nouvelles décisions d'autorisation d'opérations de concentration, dont 21 décisions simplifiées.

Parmi ces décisions figure la décision n° 19-DCC-259 du 18 décembre 2019 à la faveur de laquelle l’Autorité de la concurrence a autorisé, sans condition, le groupe La Poste à prendre le contrôle exclusif de la société Softeam dans le cadre de sa stratégie de diversification de ses activités.

Au sein de la branche numérique, la société Docaposte, filiale du groupe La Poste, a pour mission de développer de nouveaux outils numériques afin de permettre aux entreprises de réussir leur transformation numérique.

Softeam est une entreprise de services du numérique (« ESN »)2 qui propose des services de conseil informatique, de maîtrise d’œuvre et de maîtrise d’ouvrage, ainsi que des activités de formation et de communication digitale. Softeam intervient également dans les technologies de la transformation digitale avec des services liés à la gestion de la data ou encore en proposant des outils d’intelligence artificielle.

Délimitation des marchés pertinents

Les parties sont simultanément actives sur les marchés des services informatiques. Le groupe La Poste est également actif sur les marchés du traitement de documents et de données pour compte de tiers et des services de colocation (ou data centers) via sa filiale Docaposte, lesquels présentent respectivement un lien vertical et de connexité avec les activités de Softeam sur le marché des services informatiques.

À l’occasion de cette opération, l’Autorité relève que les marchés des services informatiques sont caractérisés par des innovations constantes depuis dix ans, qu’il convient de prendre en compte. Ces développements technologiques importants concernent de façon transversale les principaux segments des services informatiques sur lesquels opèrent les parties, à savoir les services de gestion globale, le BPO, le développement et l’intégration de logiciels, ainsi que le conseil qui doit tenir compte de ces nouvelles évolutions afin d’accompagner les entreprises dans leurs nouveaux défis numériques (pt. 13).

Dans ce contexte, l’Autorité a dégagé deux nouvelles délimitations des marchés des services informatiques, afin d’intégrer les évolutions du secteur :

—  une première segmentation en fonction des activités de type « SMACS » pour : « Social ; Mobile ; Analytique ; Cloud et Sécurité ». Ces activités sont considérées par les principaux acteurs du secteur comme les vecteurs majeurs de la transformation numérique de l’économie ;

—  une seconde segmentation en fonction des principales innovations : l’intelligence artificielle ; l’internet des objets « IoT » ; la blockchain ; les méga-données (big data); les services hébergés (cloud); la réalité virtuelle ou augmentée; la robotique ; et les super-ordinateurs.

Au regard notamment des résultats du test de marché, l’Autorité observe que les services informatiques forment un écosystème dynamique, qui n’exclut pas une définition globale : les services informatiques « ne sont pas dépendants de la technologie utilisée », mais ces technologies « sont de plus en plus intégrées dans la mise en œuvre d’une solution informatique » et irriguent de manière « transversale » la définition traditionnelle du marché (pt. 18).

Toutefois, la question de la délimitation exacte de ces marchés est restée ouverte, dans la mesure où les conclusions de l’analyse concurrentielle serait demeurées inchangées, quelle que soit les délimitations retenues.

Par ailleurs, l’Autorité a retenu que le groupe La Poste opérait sur les marchés du traitement des documents et données pour compte de tiers au travers de sa filiale Docaposte, laquelle est présente tant sur les segments de marché « entrants » que « sortants ».

Enfin, l’Autorité a considéré que La Poste, via sa filiale Docaposte, était active sur le marché des services de colocation dans la mesure où elle exploite plusieurs centres de données et qu’elle fournit, même de manière exceptionnelle, des services de colocations à des clients tiers.

Analyse concurrentielle

L’Autorité observe d’emblée que le marché des services informatiques en France est atomisé, avec la présence d’acteurs importants, ainsi que d’acteurs plus petits qui agissent en tant que spécialistes, grâce à leur expertise (pt. 49) et que sur le marché global des services informatiques, la part de marché cumulée des parties est estimée à [0-5] % au niveau national (pt. 42), de sorte que l’opération n’est pas de nature à porter atteinte à la concurrence par le biais d’effets horizontaux sur les marchés de services informatiques concernés (pt. 51).

Pour le reste, l’Autorité écarte les risques liés aux effets verticaux de l’opération. Si Docaposte est active sur le marché du traitement de documents et de données pour compte de tiers, lequel présente un lien vertical avec les activités de services informatiques de Softeam, avec le développement des outils numériques tels que l’intelligence artificielle ou la gestion de données (« data analytics ») où Softeam est présente, la position de la nouvelle entité sur le marché des services informatiques sera limitée et, en tout état de cause, très inférieure à 25 %, quelles que soient les segmentations envisagées. Par ailleurs, les parties font face à de nombreux concurrents, au niveau national, tels que les sociétés Tessi, Jouve, Sopra-Steria ou encore IBM, qui sont actives sur les deux marchés concernés par les effets verticaux liés à l’opération.

Enfin, l’Autorité a examiné si l’acquisition de Softeam par le groupe La Poste n’était pas de nature à restreindre la concurrence sur le marché des services de colocation (data centers), notamment par les effets congloméraux de l’opération liés à l’existence d’un avantage non-réplicable, constitué par l’image de marque dont bénéficie le groupe La Poste, en tant qu’acteur historique de la livraison de courriers, quant à la sécurité et à la confidentialité des données personnelles de ses clients. Ainsi, Softeam est active dans la gestion de la donnée (« data analytics ») qui présente un lien de connexité avec le développement des services de colocation du groupe La Poste.

Toutefois, l’Autorité observe que la part de marché de La Poste est très limitée sur le marché des services de colocation et qu’elle fait face à la pression concurrentielle de géants mondiaux et européens de l’hébergement de données. En outre, elle relève que la position de la nouvelle entité sur le marché des services informatiques sera limitée et, en tout état de cause, très inférieure à 25 %, quelles que soient les segmentations envisagées des marchés concernés.

Pour le surplus, je vous renvoie à la lecture du communiqué de l'Autorité de la concurrence.

 



On verra également la décision n° 19-DCC-229 du 11 décembre 2019 à la faveur de laquelle l’Autorité de la concurrence a autorisé, sans condition, la prise de contrôle exclusif de la société Aéroport de Toulouse-Blagnac, société gestionnaire de l’aéroport de Toulouse, par le groupe de travaux publics Eiffage. L’opération consistait dans le rachat de la participation jusqu’alors détenue par la société chinoise Casil Europe dans la cible.

Le groupe Eiffage et ATB sont présents dans le secteur de la gestion et de l’exploitation d’aéroports qui comprend notamment le marché amont de l’octroi des concessions aéroportuaires, seul marché sur lequel les activités des parties se chevauchent horizontalement. Les marchés d’appels d’offres en travaux aéroportuaires sont également concernés par l’opération dans la mesure où il existe un lien vertical entre les activités de travaux public du groupe Eiffage et les appels d’offre lancés par ATB pour ce type de travaux.

S’agissant d’abord de l’analyse des effets horizontaux, l’Autorité observe qu’à l’issue de l’opération, le groupe Eiffage gérera deux aéroports de dimension régionale en France — Toulouse-Blagnac et Lille-Lesquin, ce qui représente un trafic de 11,6 millions de passagers en 2018, mais une part de marché cumulée de 1,2 % sur un marché de dimension européenne et de 5,6 % dans l’hypothèse d’un marché national. Compte tenu de ces parts de marché limitées, l’Autorité estime que l’opération n’est pas susceptible de porter atteinte à la concurrence sur le marché de l’octroi de concessions aéroportuaires par le biais d’effets horizontaux.

S’agissant ensuite de l’analyse des effets verticaux, l’Autorité a écarté tout risque d’atteinte à la concurrence sur les marchés de travaux et d’entretien des infrastructures aéroportuaires. De fait, si, à l’issue de l’opération, le groupe Eiffage, agissant en tant qu’entité adjudicatrice, sera en mesure d’allouer tout ou partie des besoins en fournitures et en services d’ATB à l’une ou plusieurs de ses filiales de ses branches bâtiment, infrastructures, ou énergie système, quel que soit le montant du marché, l’essentiel des marchés d’ATB, en valeur, est soumis à une procédure encadrée de publicité et de mise en concurrence (pt. 39), de sorte qu’ATB ne sera pas en mesure de favoriser les offres des filiales du groupe Eiffage en matière de marchés de travaux. En tout état de cause, eu égard à sa position marginale à la fois en tant que candidat et en tant qu’attributaire des marchés passés par ATB, le groupe Eiffage n’a pas les capacités à court ou à moyen terme pour exécuter l’intégralité des besoins d’ATB.

Pour le surplus, je vous renvoie à la lecture du communiqué de l'Autorité de la concurrence.

 



Par ailleurs, le 4 décembre 2019, l’Autorité de la concurrence a adopté une décision n° 19-DCC-235 à la faveur de laquelle elle a autorisé la prise de contrôle exclusif de la société AltéAd Marchal Levage, des actifs de la branche transport du groupe AltéAd et de la société Infinitrans par la société Capelle Investissements.

Les parties sont toutes deux principalement actives dans le secteur du transport de marchandises.
 
Cette opération s’inscrit dans le cadre d’une procédure de redressement judiciaire, ouverte par le tribunal de commerce de Paris, au bénéfice des 38 sociétés du groupe AltéAd et a bénéficié d’une dérogation à l’effet suspensif du contrôle des concentrations le 11 juillet 2019. Par jugements en date du 26 juillet 2019, le tribunal de commerce de Paris a arrêté le plan de cession des sociétés Infinitrans SAS et AltéAd Marchal Levage SAS, et des actifs de 4 sociétés du groupe AltéAd, les cibles, au profit du groupe Capelle.

Délimitation des marchés pertinents

Au cas d’espèce, les parties sont simultanément actives dans le transport routier de marchandises, par transport dit « exceptionnel » et « spécialisé », deux types de services qui, jusque-là n’avait été analysé par la pratique décisionnelle. Prenant acte du fait que les concurrents et clients interrogés lors des tests de marchés confirmaient une telle définition, l’Autorité de la concurrence a délimité deux nouveaux marchés : le marché du transport routier exceptionnel de marchandises, et celui du transport routier spécialisé de marchandises. Elle considère en effet qu’en raison des contraintes réglementaires spécifiques, de la main d’œuvre qualifiée et des coûts engendrés, le transport routier exceptionnel ne se confond pas avec les autres modes de transport routier de marchandises. De même, elle a estimé que le transport routier spécialisé de marchandises ne se confond pas avec le transport exceptionnel, dans la mesure où il ne concerne pas spécifiquement des objets de masse ou volume exceptionnels, ni avec les modes de transports précédemment délimités par la pratique décisionnelle, en raison de la nécessité d’un outillage spécialisé.

Analyse concurrentielle

Qu’il s’agisse du marché du transport routier exceptionnel de marchandises ou de celui du transport routier spécialisé de marchandises, l’Autorité de la concurrence a constaté que les parts de marché de la nouvelle entité serait modérées et que la nouvelle entité restera confrontée à de nombreux opérateurs de taille nationale comparable ou supérieure.

Quant aux éventuels effets congloméraux induits, l’Autorité observe que l’opération a pour effet d’élargir les capacités de Capelle sur les marchés du transport routier exceptionnel et celui du transport routier spécialisé, en augmentant le nombre de véhicules disponibles dans son parc. La crainte est alors qu’à l’issue de l’opération, la nouvelle entité impose à ses clients d’acheter simultanément ses prestations de logistique et de génie. Mais dans la mesure où la nouvelle entité détiendra des parts de marchés inférieures à 30 %, quels que soient les marchés et segmentation envisagées et qu’elle demeurera confrontée à de nombreux concurrents, sur chaque marché sur lesquels elle sera active, l’Autorité estime que l’opération n’est pas de nature à porter atteinte à la concurrence par le biais d’effets congloméraux.

Pour le surplus, je vous renvoie à la lecture du communiqué de l'Autorité de la concurrence.

 



On verra enfin la décision n° 19-DCC-233 du 4 décembre 2019 à la faveur de laquelle l’Autorité de la concurrence a autorisé, sans condition, la prise de contrôle exclusif du groupe Léon de Bruxelles, lequel exploite une chaîne de restauration, au travers de ses 82 établissements sous l’enseigne éponyme, par le groupe Bertrand qui exploite 840 établissements sous enseignes Au Bureau, Hippopotamus, Café Leffe, Burger King ou encore de grandes brasseries parisiennes, telles que la Brasserie Lipp, La Coupole ou Au Pied de Cochon.

Les deux groupes exploitent des chaînes de restauration concurrentes, en particulier sur le marché de la restauration sophistiquée incluant, notamment, un service à table, qui se distingue du marché de la restauration rapide à bas prix (qui comprend les fast-foods, les self-services et la vente à emporter/livraison à domicile).

Toutefois, en raison de la présence d’un grand nombre de concurrents (Pizza Pino, Paradis du Fruit, Buffalo Grill, Indiana Café…) dans chaque zone locale où les établissements des deux groupes sont présents tous les deux, l’opération ne soulève pas de problèmes de concurrence de nature à faire obstacle à ce rachat. Quelles que soient les segmentations retenues, les parts de marché cumulées des parties sont inférieures à 25 %.

Pour le surplus, je vous renvoie à la lecture du communiqué de l'Autorité de la concurrence.

 



Les autres décisions n'appellent pas, nous semble-t-il, de commentaires spécifiques :

Décision n° 19-DCC-210 du 21 novembre 2019 relative à la prise de contrôle conjoint du fonds de commerce du magasin sous enseigne Géant Casino situé à La Chapelle-sur-Erdre par M. Claret et par la société Coopérative U Enseigne ;

Décision n° 19-DCC-232 du 12 décembre 2019 relative à la prise de contrôle conjoint d’actifs immobiliers par la société Bouygues Immobilier et la Caisse des dépôts et consignations ;

Décision n° 19-DCC-238 du 10 décembre 2019 relative à la prise de contrôle exclusif par la coopérative Océalia de la Société Financière Cormouls Houlès ;

Décision n° 19-DCC-248 du 11 décembre 2019 relative à la prise de contrôle conjoint par la Caisse des Dépôts et Consignations et le Groupe des Assurances du Crédit Mutuel d’un ensemble immobilier en l’état futur d’achèvement ;

Décision n° 19-DCC-249 du 11 décembre 2019 relative à la prise de contrôle exclusif, par la société Naxicap Partners, d’actifs du groupe Emera ;

Décision n° 19-DCC-258 du 26 décembre 2019 relative à la prise de contrôle exclusif de la société Le Calvez par le groupe Jacky Perrenot ;

Décision n° 19-DCC-260 du 26 décembre 2019 relative à la prise de contrôle exclusif du groupe Tara Jarmon par le groupe Zapa ;

Décision n° 19-DCC-264 du 26 décembre 2019 relative à la prise de contrôle exclusif des sociétés GR Automobiles et Agora Automobiles par la société EdenAuto.

 



Les 21 décisions simplifiées :

Décision n° 19-DCC-218 du 5 décembre 2019 relative à la prise de contrôle conjoint par le groupe Deutz et le groupe Sany de la société Kunshan Sany Power ;

Décision n° 19-DCC-225 du 16 décembre 2019 relative à la prise de contrôle exclusif du Groupe Récréa par le Fonds de Consolidation et de Développement des Entreprises II ;

Décision n° 19-DCC-226 du 5 décembre 2019 relative à la prise du contrôle conjoint par les sociétés Akuo Energy Afrique SAS et Pash Kita Limited de la société Kita* Holdco SAS ;

Décision n° 19-DCC-228 du 2 décembre 2019 relative à la création d’une entreprise commune de plein exercice par les sociétés ITM Entreprises et Flomis ;

Décision n° 19-DCC-231 du 16 décembre 2019 relative à la prise de contrôle exclusif de six sociétés immobilières d’Outre-mer par CDC Habitat ;

Décision n° 19-DCC-234 du 4 décembre 2019 relative à la prise de contrôle conjoint des sociétés Gablin et Buterfly par les sociétés ITM Entreprises et 2M2L ;

Décision n° 19-DCC-239 du 12 décembre 2019 relative à la prise de contrôle exclusif par la société Franprix Leader Price Holding des sociétés Capdis et Holding Mag Spring ;

Décision n° 19-DCC-242 du 13 décembre 2019 relative à la prise de contrôle conjoint de la société Olibanne par les sociétés Stenivest et ITM Entreprises ;

Décision n° 19-DCC-243 du 17 décembre 2019 relative à la prise de contrôle exclusif de la société Leroux Automobiles par le groupe Jallu-Berthier ;

Décision n° 19-DCC-245 du 13 décembre 2019 relative à la prise de contrôle exclusif de la société Kos par la société ITM Alimentaire Ouest ;

Décision n° 19-DCC-246 du 11 décembre 2019 relative à la prise de contrôle exclusif de la société Bordeaux Motors par la société SIPA ;

Décision n° 19-DCC-247 du 13 décembre 2019 relative à la prise de contrôle conjoint de la société Maespo par les sociétés Orycan et ITM Entreprises ;

Décision n° 19-DCC-251 du 13 décembre 2019 relative à la création d’une entreprise commune de plein exercice par les sociétés Kerdonis et ITM Entreprises ;

Décision n° 19-DCC-252 du 13 décembre 2019 relative à la prise de contrôle exclusif de la société Guisa par la société ITM Alimentaire Nord ;

Décision n° 19-DCC-253 du 13 décembre 2019 relative à la prise de contrôle exclusif des sociétés Générale Automobile de Vierzon et Générale Automobile de Bourges par le groupe Vincent ;

Décision n° 19-DCC-254 du 13 décembre 2019 relative à la prise de contrôle exclusif par la société Cobredia de la société Horizon Auto ;

Décision n° 19-DCC-255 du 17 décembre 2019 relative à la prise de contrôle conjoint de la société Auda par les sociétés Vercorine et ITM Entreprises ;

Décision n° 19-DCC-256 du 18 décembre 2019 relative à la prise de contrôle exclusif par Forza Automobiles des sociétés Saussereau SAS, NSA et Avenir Automobiles ;

Décision n° 19-DCC-257 du 18 décembre 2019 relative à la prise de contrôle conjoint du groupe Jacky Perrenot par les sociétés Sigefi et EMZ Partners ;

Décision n° 19-DCC-262 du 26 décembre 2019 relative à la prise de contrôle exclusif de la société Arverne Automobiles par le groupe Maurin ;

Décision n° 20-DCC-04 du 15 janvier 2020 relative à la prise de contrôle exclusif de la société Ligeria par la société Les Terrasses.

Actualité du droit de la concurrence et de la distribution :
que retenir de 2019 pour mieux décider en 2020 ?

Paris — 26 février 2020

 

Madame, Monsieur,

Les cabinets LaBruyère et Prôreus ont le plaisir de vous convier à leur matinée annuelle sur le sujet « Actualité du droit de la concurrence et de la distribution : que retenir de 2019 pour mieux décider en 2020 ? ».

L’année écoulée a de nouveau été riche en évolutions, qu’il s’agisse du droit des pratiques restrictives de concurrence (ordonnance d’avril 2019, rupture brutale, déséquilibres, conventions uniques…), du droit de la concurrence déloyale, ou du droit antitrust (échanges d’informations ou concertations tarifaires illicites, groupements commerciaux et professionnels, abus tarifaires et d’exclusivités…). La distribution a également donné lieu à d’intéressantes décisions, qu’il s’agisse de distribution sélective, de distribution par internet ou via des plateformes par exemple.

Responsables juridiques et juristes en entreprises, nous vous proposons de nous retrouver le mercredi 26 février, de 9h00 à 12h30 (accueil à partir de 8h30), à l’Hôtel California, 16 rue de Berri, 75008 Paris, pour faire un point et débattre sur les principales décisions rendues en 2019 susceptibles d’impacter les politiques commerciale et tarifaire de votre entreprise.

Réponse souhaitée avant le 15 février 2020 - Contact et inscription : emmanuel.dieny@proreus.fr ou accueil@labruyereavocats.com.

Virginie Bernard/Emmanuel Dieny

Quels modèles de la concurrence dans l'économie numérique ? La parole aux acteurs

Rennes — 6 mars 2020

 


Bonjour,

Le M2 Concurrence Consommation et Droit de la Propriété Industrielle (M2 CCDPI) de l'Université de Rennes 1 organise le 6 mars 2020 un colloque sur le thème « Quels modèles de la concurrence dans l'économie numérique ? La parole aux acteurs ».

Un après-midi d'échanges en présence de l'Autorité de la concurrence, au cours desquels enseignants-chercheurs spécialisés dans l'économie numérique, startups et multinationales (Uber, Leocare, Essilor, Seraphin) pourront débattre du fonctionnement concurrentiel de leurs marchés et de leurs problématiques.

Pour accéder au programme cliquez ICI, et pour vous inscrire, cliquez .

Nous aurons le plaisir de vous accueillir.

Aziz Mouline, Professeur à l'Université Rennes 1, Directeur du M2 CCDPI

Kélig Bloret-Dupuis, Professeure associée à l'Université de Rennes 1 - Responsable Juridique Concurrence Essilor International

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